Le Journal de Montreal - Weekend
L’ADOLESCENCE À LA FRANÇAISE
∫ Mon père est femme de ménage ∂∂Σ ∂∂∂∂∂
L’auteure Saphia Azzeddine devient réalisatrice, le temps de nous présenter Polo, adolescent français, sa famille et ses copains. Un regard à la fois juste et humoristique sur la société française.
C’est un film sans prétention que ce Mon père est femme de
ménage, avec une distribution qui constitue – avec les dialogues – la principale force du film.
Polo (Jeremie Duvall) est un ado tout ce qu’il y a de plus normal, dans une famille à la limite du caricatural. Son père, Michel (François Cluzet), travaille pour une entreprise de nettoyage, donc – aux yeux des copains de Polo – il est une « femme de ménage ».
Sa mère, Suzanne (Nanou Garcia), est alitée pour cause de maladie, tandis que sa soeur, Alexandra (Alison Wheeler), rêve d’être Miss. Quant aux copains d’école, ils sont à l’image d’une France cosmopolite : juifs, musulmans, noirs, Tunisiens, Roms, bref Français.
Pour le spectateur québécois, le moins que l’on puisse dire, c’est que le film est dépaysant, notamment au niveau des dialogues entre les jeunes et du vocabulaire. Facile de louper des gags avec le débit de parole et le langage utilisé. À l’école, par contre, malgré les différences du système scolaire, on comprend tout de même le cheminement de Polo, les examens, le passage au bac et la suite.
À la maison, c’est plus simple ou, plutôt, humoristiquement pathétique. Car c’est essentiellement là la fine ligne que navigue la scénariste et réalisatrice : les efforts de Michel pour que son fils réussisse mieux que lui, la déconnexion qui existe entre Polo et sa famille, alors qu’il n’y a que son père qui trouve grâce à ses yeux.
Avec les copains d’école, on tombe dans la rigolade avec tous les gags sur les juifs, les Noirs, les musulmans… et les Blancs, tellement ordinaires qu’il n’y a pas vraiment de blagues sur eux. Alors il ne faut pas se choquer (ou le faut-il ?), quand les jeunes sont entre eux, d’en entendre un demander au noir du groupe : « Combien de temps ça prend à une Noire pour sortir les ordures ? ». Quand celui-ci répond ne pas savoir, la réponse fuse : « Neuf mois ». Et il n’y a pas de discrimination, toutes les origines des membres du groupe servent de cible à la rigolade.
C’est un bon petit film, dont le principal défi, au Québec, est d’abord d’accrocher le spectateur à l’histoire et la réalité des personnages. Par contre, si on choisit d’embarquer et de se laisser dépayser, on ne peut qu’apprécier la justesse de l’interprétation des acteurs, à commencer par Jeremie Duvall et François Cluzet. On peut même grincer des dents en retrouvant certains comportements parentaux qui ne connaissent pas de frontières géographiques… Au final, si Mon père est femme
de ménage est un divertissement léger avec de bons moments, ça ne vaut pas vraiment le coût du billet de cinéma.