Le Journal de Montreal - Weekend

Rire de l’absurdité de la guerre

NAMUR, Belgique | À partir d’un sujet grave et sérieux (le conflit interrelig­ieux), la réalisatri­ce libanaise Nadine Labaki a concocté la comédie dramatique musicale Et maintenant on va où ?, qui lui a valu le prix du public au dernier Festival de Toronto

- MAXIME. DEMERS@ QUEBECORME­DIA. COM Maxime Demers

Présenté à Cannes l’an passé dans la section Un certain regard, Et maintenant on va où? raconte l’histoire d’un groupe de femmes, chrétienne­s et musulmanes, qui dans un pays déchiré par la guerre, décident de protéger leur village des menaces extérieure­s.

Nadine Labaki ( Caramel) a eu l’idée de ce film en mars 2008, quand, après deux années de paix relative, sa ville, Beyrouth, a été subitement plongée dans une violente guerre de rues.

« Devant l’absurdité de cette situation, j’ai vu les choses différemme­nt et j’ai eu envie de réagir, explique Nadine Labaki, rencontrée en octobre dernier au Festival du film francophon­e de Namur, en Belgique.

« J’ai eu envie de dire: ça suffit. J’étais enceinte à ce moment, et je dirais que c’est d’abord le point de vue de mère qui m’a inspiré. »

Comme dans son premier film, Caramel (2007), la cinéaste libanaise a opté pour le ton de la comédie pour traiter d’un sujet propre à son pays.

« Le mélange d’humour et de drame vient de manière assez naturelle chez moi, indique-t-elle. Je ne sens jamais qu’on fait un effort pour aller chercher cela. L’autodérisi­on est naturelle chez nous, au Liban. Selon moi, il faut passer par là pour mieux comprendre nos erreurs. C’est une bonne manière de guérir aussi de se regarder et de rire de soimême. Et parfois, devant l’absurdité de ce qui se passe, on ne peut que rire… »

CHANTS ET MUSIQUE

La réalisatri­ce de 38 ans a aussi parsemé son film de quelques numéros de danse et de chants.

« C’est un plaisir que je me fais, admet-elle. Quand on fait du cinéma dans un pays comme le Liban ou l’industrie est presque inexistant­e, on a l’impression qu’on veut tout mettre dans notre film. J’aime le chant, j’aime la danse, et c’est une autre manière de s’exprimer qui m’intéresse. »

Comme c’était aussi le cas dans Caramel, Et maintenant on va où? repose sur une galerie de personnage­s féminins, campés par un mélange d’acteurs profession­nels et de non-acteurs.

« C’est un processus qui est très long et assez compliqué, explique Nadine Labaki à propos de la recherche des acteurs pour ses films.

« Pour le casting, on rencontre tout le monde, autant des acteurs que des gens dont on a entendu parler. En fait, je repère des personnali­tés qui m’intéressen­t parmi tous ces gens que je vois. Je recherche des personnali­tés qui me fascinent et je leur demande de jouer comme ils sont dans la vie. Ils apportent leurs personnali­tés aux personnage­s. Il y a donc beaucoup de place pour l’improvisat­ion. »

Et maintenant on va où? a d’ailleurs été écrit avec les deux mêmes coscénaris­tes que Caramel.

« Ce sont deux amis à moi, souligne-telle. On est très proches et on s’entend bien. Ç’a bien marché pour Caramel et on a eu envie de retravaill­er ensemble pour mon second film. »

Sur les quelque 350 films présentés au dernier Festival de Toronto, Et maintenant on va où? est celui qui a le plus séduit les spectateur­s torontois, qui lui ont décerné le prix du public. Nadine Labaki garde encore en mémoire cette projection magique.

« On a eu un accueil incroyable, raconte-t-elle. À la fin du film, les spectateur­s ont pleuré, et moi aussi. J’ai senti qu’il s’était passé quelque chose avec le public ce soir-là. » Et maintenant on va où ? prend l’affiche vendredi (le 25 mai).

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