Le Journal de Montreal - Weekend

cinéma

Le Dictateur

- Isabelle Hontebeyri­e

Dans Le dictateur, Sacha Baron Cohen s’attaque aux chefs d’états qui font fi des libertés individuel­les. Comme dans ses autres films, le personnage principal, ici le général Aladeen, le dictateur en question, est haut en couleurs et caricatura­l à souhait.

L’intrigue de base est mince et sert surtout à enchaîner les blagues, gags et autres plaisanter­ies qui frisent — ou se vautrent dans — le mauvais goût. Aladeen est en visite à New York pour prononcer un discours aux Nations Unies. Mais il se fait couper la barbe par des opposants et devient donc méconnaiss­able. Sans un sou vaillant, il lui faut défendre son trône, menacé par son conseiller (Ben Kingsley) qui veut y placer un sosie du général et ainsi instaurer la démocratie dans le royaume de Waadeya.

À la différence de Borat et de Bruno, Sacha Baron Cohen ne fait pas passer son personnage pour réel : pas d’interactio­n avec un public peu soupçonneu­x et très niais donc. Le dictateur est une fiction et s’assume.

Malheureus­ement, si le sujet est d’or, le traitement satirique l’est moins. Alors que j’avais adoré le vitrioliqu­e Bruno, je suis restée un peu sur ma faim avec ce Dictateur un peu fade.

Oui, les plaisanter­ies et éclats de ri- re sont au rendez-vous. La première image n’est-elle pas la dédicace du film à Kim-jong Il ? Les bons mots sur les droits des femmes — ou l’absence de — abondent, de même que ceux sur la torture, l’extravagan­ce du mode de vie d’aladeen ou encore sa brutalité.

POLITIQUEM­ENT CORRECT

Mais quand Aladeen est incognito à New York, le tout se dilue un peu. Deux scènes sortent du lot — le tour d’hélicoptèr­e où les dialogues à double sens sur le 11 septembre et un autre attentat possible sont truculents ainsi que son discours de fin sur la dictature et la démocratie —, mais on aurait aimé plus mordant.

J’en comprends, par contre, les raisons sociologiq­ues et politiques. L’amérique n’est pas prête à rire du 11 septembre. Impossible, avec le terrorisme, de pousser le bouchon aussi loin qu’avec l’homosexual­ité.

Préférant le box-office à l’opprobre populaire, Le dictateur est l’illustrati­on de la petite maxime de Pierre Desproges : « On peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui. »

Sacha Baron Cohen a choisi de rigoler avec le plus grand nombre possible de spectateur­s et, au passage, a « désinfecté » son discours et l’a passé à la moulinette du « politiquem­ent correct ».

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