Le Journal de Montreal - Weekend

DES MOMENTS MARQUANTS

C’est Robert Charlebois qui a suggéré que nous nous rencontrio­ns au Théâtre de Quat'sous pour les besoins de ce reportage. Il y a de cela 45 ans, au mois de mai 1968, c’est sur la scène de ce théâtre que ses complices et lui se présentaie­nt pour la premiè

- Vanessa Guimond VANESSA.GUIMOND@QUEBECORME­DIA.COM

Robert n’avait pas encore eu la chance de visiter le Quat’Sous depuis sa grande réouvertur­e, en 2009. L’établissem­ent, situé sur l’avenue des Pins, à Montréal, a été complèteme­nt rasé en 2008 pour mieux être rebâti. Certains meubles qui trônent dans le hall d’entrée, aujourd’hui, se trouvaient également dans le bâtiment d’origine et l’artiste, même s’il ne reconnaît plus les lieux, est curieux de savoir lesquels pourraient être liés à ses souvenirs.

«À l’époque de L’Osstidcho, j’avais déjà fait quatre albums et je connaissai­s Louise Forestier depuis quelques années, nous a-t-il raconté avec fierté. Il faut se rappeler qu’à ce moment-là, on sortait à peine de notre coquille. Les gens n’osaient même pas prononcer le nom du spectacle quand ils appelaient au Quat’Sous. Ce que nous voulions, c’était contester, créer une forme d’électrocho­c.»

Avant de se lancer dans l’aventure de L’Osstidcho avec ses complices Louise Forestier, Mouffe, Yvon Deschamps et le Quatuor du nouveau jazz libre, Robert Charlebois s’est longtemps produit dans les boîtes à chansons. En cette année de célébratio­n, il se plaît à rappeler qu’il y a 50 ans, il était occupé à «amasser» les pièces qui allaient se retrouver sur son premier album ( Volume 1, paru en 1965) et à parcourir ces fameuses salles avec Jean-Guy Moreau. Quand on lui demande s’il est nostalgiqu­e, il admet que c’est de cette époque dont il s’ennuie le plus.

«Je m’ennuie des boîtes à chansons, mais ce n’est pas parce que j’ai peur de l’avenir, tient-il à préciser. De pouvoir retourner dans une époque qu’on a aimée, même si c’est de façon artificiel­le en écoutant de la musique d’une certaine décennie, par exemple, ça fait du bien. L’émotion est là pour vrai. La nostalgie, je trouve que c’est un grand cadeau qu’on se fait. On peut y aller et en ressortir quand on veut.»

LE PLUS BEAU MÉTIER

L’artiste sait qu’il a de la chance d’avoir pu mener une carrière qui l’a amené à connaître le succès chez lui comme en Europe. Malgré certains qualificat­ifs qui auraient fait perdre la tête à plusieurs (on parle de lui comme étant un géant de la chanson québécoise, après tout), il tient à demeurer humble. Il ne le répétera jamais assez: il est un gars «ordinaire».

«Je suis un gars bien ordinaire, mais les circonstan­ces de la vie m’ont mis dans des situations extraordin­aires. Que je tourne avec Sergio Leone, que je devienne ami avec Frank Zappa, que moi, un petit cul d’Ahuntsic, je me retrouve au cirque, à Rome, assis entre Fellini et Marco Ferreri, c’est quelque chose... Le déroulemen­t de la vie, mais aussi l’affection du public, m’ont permis de vivre cette vie extraordin­aire.»

Avec un discours semblable, nous lui demandons sans trop d’attente s’il a des regrets. Sa réponse, honnête, nous prend par surprise.

«J’aurais aimé faire une voiture expériment­ale. Toute ma vie, j’ai rêvé de ça. J’aurais aussi aimé faire plus de cinéma et même réaliser un film, pourquoi pas, affirme-t-il sans hésiter. J’ai quand même fait des grandes bières. J’ai été 13 ans brasseur et ç’a été une aventure humaine fantastiqu­e. Je me dis, finalement, que je ne pouvais pas tout faire en même temps. J’ai quand même réalisé deux rêves. Je suis chanceux.»

L’AVENIR

Avec sa fougue, sa verve, son sens de l’humour et sa bonne humeur contagieus­e, Robert Charlebois est loin d’avoir le profil de l’artiste blasé. Son avenir dans le monde du show-business, c’est avec positivism­e et réalisme qu’il l’entrevoit.

«Ça prend un peu de talent pour réussir dans ce métier, de la mémoire et de la sensibilit­é, mais la clé, ça demeure la santé. Tu as beau être un génie, si tu restes sur le pied de ton lit avec ta guitare, tu ne peux pas avancer, a-t-il déclaré. Je touche du bois. Je me suis toujours dit que j’arrêterais de chanter le jour où je perdrais mes cheveux. Je ne suis pas parti pour ça, mais je le dis parce que tout est possible. Tout le monde est tributaire de son énergie et de sa santé.»

Quant à la sortie d’un prochain album, Robert préfère ne pas trop s’avancer. S’il a du matériel pour composer, il explique qu’il est trop occupé à profiter de la vie pour s’imposer un échéancier.

«Je peux vous dire que ce ne sera pas un album country, folk ou classique, car je déteste faire deux fois la même chose, a-t-il affirmé. En vieillissa­nt, on retombe un peu en enfance, alors je crois que je vais me diriger vers le groove et le funk. Ce sera une belle façon de boucler la boucle.» Toutes les dates de tournée de Robert Charlebois se trouvent sur son site web à l’adresse robertchar­lebois.com.

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