Le Journal de Montreal - Weekend
UNE BOUFFÉE D’ ÉTÉ EMPREINTE DE NOSTALGIE
C’est sur la musique des années 60 que la pièce Un homme, deux patrons a pris son envol au Monument-national en début de semaine dernière. Présenté par Juste pour rire et mis en scène par Normand Chouinard, le spectacle mettant en vedette Marcel Leboeuf,
Écrite en 1745, la pièce de l’auteur italien Carlo Goldoni, Arlecchino servitore di due padroni ( Arlequin, serviteur de deux maîtres) semble plaire, aujourd’hui encore, à un certain public, surtout aux amateurs de théâtre d’été, mais aussi aux nostalgiques des années 60, car l’adaptation québécoise nous transporte en 1963, à Magog, où les magouilles et la petite pègre sont à l’honneur.
Les magnifiques décors rappelant l’ancien Magog nous replacent dans le contexte de cette époque, alors que les costumes des comédiens et musiciens ajoutent au tableau. Vous souvenezvous des bottes et des chaussures en cuir verni blanc que les chics messieurs portaient en dansant sur la musique des Baronets? Voilà, nous y sommes!
L’histoire raconte celle de Francis Frenette (Marcel Leboeuf), un type fauché, plutôt maladroit, pas très brillant, encore moins éduqué et dépourvu de raffinement. Surtout, il est affamé, au point d’être prêt à tout pour avoir une bouchée de pain. Il agit comme le pire des menteurs, voire un arnaqueur. Peu importe si Francis Frenette est malhonnête, il est tellement sympathique qu’on lui pardonne.
COMPLICITÉ AVEC LE PUBLIC
Outre l’histoire qui manque un peu de substance, c’est principalement le jeu de Marcel Leboeuf qu’on remarque d’emblée. Il va chercher la complicité du public, et c’est ce qui fait d’Un homme, deux patrons une bonne pièce. Pour ce faire, il brise continuellement le quatrième mur en s’adressant directement à l’auditoire, allant même chercher des spectateurs dans la salle pour qu’ils lui donnent un coup de main.
Il en aura besoin, car les choses se compliquent sans cesse tandis qu’il tente de servir deux patrons encore plus malhonnêtes que lui. Ceux-ci, de surcroît, se connaissent et sont même amoureux l’un de l’autre. Comme Francis souhaite empocher deux salaires à leur insu, il devra veiller à ce que ses deux patrons ne se croisent pas. Les malentendus, inévitablement, se multiplieront. Et lorsque la confusion sera à son comble, on l’entendra penser tout haut, cherchant des solutions, même auprès du public.
Si Francis Frenette ne brille pas par son intelligence, il sait amuser par ses multiples pirouettes et bouffonneries pour épater la galerie.
QUIPROQUOS ET CONFUSION
N’ayons pas peur des mots, nous sommes dans le pur vaudeville et tout ce qui s’y rapporte est présent. La confusion et les portes qui claquent règnent sur scène. À cela s’ajoutent trois histoires d’amour à la Cendrillon. Mais l’équipe de création nous avait prévenus. On voulait recréer l’époque burlesque d’Olivier Guimond, et c’est réussi.
Outre Marcel Leboeuf, mentionnons l’excellente performance d’Anne-Elizabeth Bossé, déguisée en homme pendant pratiquement toute la durée de la pièce et agissant comme l’un des patrons de Francis Frenette. Son jeu, ses répliques et son assurance sur les planches en font une excellente comédienne.
Les rires dans la salle étaient ponctuels, tout comme les bonnes blagues sur scène. Chose certaine, pour apprécier ce spectacle, il faut s’y rendre en oubliant notre monde actuel et voir la vie avec la plus grande légèreté possible. Comme une bouffée d’air frais qui donne le ton à la saison estivale.