Le Journal de Montreal - Weekend

LE PRODIGE RÉCOMPENSÉ

- Élizabeth Ménard Le Journal de Montréal Alain Caron est en spectacle au Gesù le 3 juillet à 22 h 30 dans le cadre du Festival internatio­nal de jazz de Montréal.

Avec 20 albums et 11 prix Félix, le bassiste Alain Caron pourrait bien décider de ranger son instrument et de prendre sa retraite. Mais le jazz est une passion, un appel à la création qui lui vient depuis l’enfance. Cette année, le Festival internatio­nal de jazz de Montréal lui remet le Prix Oscar-Peterson, soulignant son apport au jazz canadien. Même les prodiges ne se lassent pas des trophées, surtout lorsque celui-ci porte le nom d’une idole.

Alain Caron a rencontré le grand Oscar Peterson il y a des années de cela, mais il s’en souvient encore comme si c’était hier. «C’était dans des conditions assez particuliè­res. On était en concert au Rivoli, à Toronto, pendant une semaine. C’était notre première fois et on avait eu un gros succès, les gens nous découvraie­nt. Des amis d’Oscar nous avaient vus et, un soir, ils l’ont emmené nous voir. Je l’ai vu aller s’asseoir au premier rang et la pression a monté d’un cran», se souvient-il. Après le spectacle, Peterson est allé les voir et les a invités à assister à un concert qu’il donnait à la Place des Arts.

«Il nous a assis au premier rang et nous a salués pendant le spectacle. Il a même mentionné qu’il aimerait faire un projet avec nous. Ça nous avait jetés par terre!»

Malheureus­ement, l’état de santé du musicien a commencé à se détériorer après ce concert et le projet n’a jamais pu se concrétise­r.

FIER DE SES ORIGINES

Le premier album de jazz qu’Alain Caron a acheté, c’était un Oscar Peterson. Pour lui, remporter ce prix portant le nom de quelqu’un qu’il admire a une significat­ion particuliè­re. «D’abord parce que je connais l’homme, puis parce que j’ai un grand respect pour le musicien. Mais aussi parce que, être reconnu par ses pairs, chez soi, ça prend encore plus de valeur», affirme le bassiste qui admet ne pas jouer souvent à Montréal. La plupart du temps, il est en tournée à travers le monde.

Le Prix Oscar-Peterson souligne pourtant son apport au jazz canadien. Lorsqu’on lui demande ce qu’il croit avoir apporté à la musique de chez nous, Alain bafouille un peu. «C’est très difficile pour moi de répondre à ça parce que, de l’intérieur, je fais ma vie. C’est une démarche qui est tout à fait naturelle. C’est évident que j’ai passé beaucoup de temps en dehors du pays et probableme­nt que j’ai contribué à faire connaître le Canada. Je dis toujours d’où je viens, que je suis Canadien, Québécois et que je viens d’un petit village qui s’appelle Saint-Éloi. Je n’ai jamais renié mes origines. Au contraire, j’en suis fier.»

AMOUREUX DU JAZZ

Le jeune Alain Caron a commencé à s’in- téresser à la musique alors qu’il avait seulement cinq ou six ans. Il se souvient du jour où il a vu une basse pour la première fois. «C’est un éclair qui m’a frappé. Je me suis dit: c’est fantastiqu­e! C’est une guitare qui joue de la batterie. Et j’en suis tombé amoureux», raconte-t-il.

Alain Caron est rapidement devenu un jeune prodige. Il a même pris la décision plutôt audacieuse d’ajouter des cordes à son instrument. Il joue aujourd’hui sur une basse à six cordes. «J’ai d’abord ajouté une corde plus aiguë. Puis il y a eu Gino Vannelli et sa musique pop qui a commencé à jouer de la basse au synthétise­ur. Ça faisait un son plus bas et ça me fascinait. J’ai donc ajouté une autre corde plus basse.»

Après avoir connu le succès dans les années 1990 avec le groupe de jazz UZEB, Alain Caron s’est lancé en solo et le succès l’a suivi. Dans sa carrière, il a remporté 11 prix Félix et été nommé meilleur bassiste électrique 8 années consécutiv­es par Jazz Report.

MULTIPLE FACES

Après le succès de Sep7entrio­n, paru en 2010, Alain Caron a lancé Multiple Faces, son huitième album solo, qui est en magasins depuis le 18 juin dernier. Sep7entrio­n l’avait emmené en tournée partout à travers le monde et ces voyages lui ont inspiré Multiple Faces.

«En fait, le voyage est le véhicule qui m’a amené à découvrir des choses. Quand je vais jouer au Moyen-Orient ou en Asie, j’écoute beaucoup la musique du pays, surtout la musique folkloriqu­e. J’aime comprendre les racines et le mécanisme. C’est une continuité dans mes recherches pour comprendre comment la musique fonctionne et pour élargir ma palette de couleurs.»

Toutes ces couleurs découverte­s en voyage se retrouvent sur l’album Multiple Faces, même si le jazz demeure le style prédominan­t. «Le fil conducteur est le jazz, c’est la forme d’expression qui me plaît le plus. Mais il y a d’autres influences et je ne me mets pas de barrières.»

Pour cet album, Alain Caron s’est entouré des mêmes complices que pour Sep7entrio­n, c’est-à-dire Pierre Côté à la guitare, John Roney aux claviers et Damien Schmitt à la batterie.

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