Le Journal de Montreal - Weekend

LA DÉCHÉANCE D’UNE

- Isabelle Hontebeyri­e Agence QMI

Le documentai­re Amy, présenté samedi soir dans le cadre du Festival internatio­nal de jazz de Montréal, prend l’affiche le 10 juillet. En entrevue, le cinéaste Asif Kapadia revient sur la vie d’Amy Winehouse et sur sa démarche.

Le Britanniqu­e Asif Kapadia est connu pour son excellent documentai­re Senna, sorti en 2010. C’est d’ailleurs grâce à ce long métrage qu’Universal, la maison de disques d’Amy Winehouse, l’a contacté pour qu’il soit à la barre d’Amy, peu de temps après le décès tragique de la chanteuse en 2011.

«Oui, bien sûr que j’ai eu des scrupules [à accepter] si peu de temps après sa mort, a-t-il indiqué. Ensuite, il s’est produit quelque chose. Quand j’ai commencé à effectuer mes recherches, le documentai­re est devenu une oeuvre plus vaste. Oui, évidemment qu’Amy porte sur Amy Winehouse, sa carrière, sa musique. Mais c’est aussi sur Londres, et sur nous tous.»

TOUJOURS D’ACTUALITÉ

«Si cela avait été une fiction, le film aurait pris des années à être présenté en salle. Là, c’était de la nouvelle et c’était important de sortir le documentai­re assez vite. Nous avons tous fait partie de cette histoire et personne n’a levé le petit doigt pour l’aider. J’ai interviewé des gens qui étaient partie prenante de cette “machine” et qui, aujourd’hui, s’interrogen­t sur le rôle qu’ils ont joué [dans sa mort]. Pour moi, c’est l’aspect intéressan­t de la démarche.»

Autant Senna replonge le public dans les années de gloire d’Ayrton Senna, autant Amy donne une sensation d’instantané­ité. «Oui, j’avais envie de faire quelque chose d’entièremen­t différent. Amy, c’est maintenant, c’est aujourd’hui. Elle est morte hier et tout le monde s’en est moqué. Pourquoi personne n’a-t-il été tenu responsabl­e de sa fin?»

Pour Asif Kapadia, «son histoire est proche de moi, je vivais au bout de sa rue quand c’est arrivé. C’est pour cette raison que j’ai senti que son histoire devait être racontée maintenant, et pas dans plusieurs années.»

«Amy possédait le talent, écrivait ses chansons et est devenue célèbre parce qu’elle racontait, dans sa musique, ce qui lui arrivait dans la vie. Et quand elle a raconté qu’elle n’était pas allée chercher de l’aide en cure de désintoxic­ation [NDLR la pièce Rehab, sortie en 2006], c’est à ce moment-là qu’elle est devenue une vedette.»

«La chanson – qui parle de son besoin d’aide et de son refus d’en obtenir – est sortie au début de l’ère numérique. C’était aussi l’époque de la guerre entre les magazines à potins britanniqu­es et des écoutes téléphoniq­ues. Dès que les médias mettaient une photo d’elle en couverture d’un magazine ou mettaient une nouvelle sur elle en ligne, tout le monde se ruait dessus. Les vidéos d’elle, l’air complèteme­nt défait, sortaient les unes après les autres. C’était comme un cyclone et c’est elle qui se trouvait en plein milieu.»

Asif Kapadia a interviewé des centaines de personnes – membres de sa famille, amis, relations profession­nelles – pour réaliser Amy. Pendant ses recherches menées au cours des quatre dernières années, il a été submergé par l’émotion à plusieurs reprises. «Tous les gens que j’ai interrogés se sont mis à pleurer. Il y avait des fois où c’était très pesant. On réalise ainsi à quel point l’histoire d’Amy Winehouse touche encore tout le monde de très près.» Amy est présenté dans les salles obscures de la Belle Province dès le 10 juillet.

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PHOTOS COURTOISIE

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