Le Journal de Montreal - Weekend
L’AMOUR DE LOIN en première mondiale à Québec
En 1998, Robert Lepage avait décliné l’offre de mettre en scène l’opéra L’Amour de loin. Il s’en est toujours voulu et il a juré de saisir l’occasion si elle se présentait à nouveau. L’heure de la revanche a maintenant sonné pour le créateur et metteur en
Le Festival d’opéra de Québec présentera jeudi, en première mondiale, au GrandThéâtre de Québec, cette oeuvre contemporaine de la compositrice finlandaise Kaija Saariaho.
«C’était un opéra que je ne connaissais pas. J’étais pas mal inculte à l’époque. Je connaissais les grands classiques de l’opéra, mais je m’intéressais moins à la musique contemporaine. Je l’ai regretté et j’ai ravalé ma honte durant plusieurs années», a laissé tomber Lepage, à quelques jours de la première mondiale.
Le metteur en scène Peter Sellars avait accepté la proposition et L’Amour de loin a été créé à Salzbourg en 2000 sous la direction du chef Kent Nagano.
«Ça nous a permis de découvrir une oeuvre absolument envoûtante, magnifique et importante. Kaija Saariaho a le grand mérite d’avoir fait passer l’art lyrique dans le XXIe siècle. Il s’agit d’une des grandes oeuvres phares du début du siècle», a-t-il indiqué, ajoutant qu’il avait manqué le bateau lorsque la proposition était arrivée sur sa table.
Il faut dire que le metteur en scène était occupé avec son spectacle solo La face cachée de la lune.
SÉPARÉS PAR LA MER
Le Metropolitan Opera de New York est à l’origine de cette nouvelle collaboration avec Robert Lepage et le Festival d’opéra de Québec. L’Amour de loin sera à l’affiche au Met durant la saison 2016-2017.
Il s’agit d’un projet de coproduction semblable à celui qui avait permis de présenter The Tempest à Québec à l’été 2012.
L’Amour de loin raconte l’histoire d’amour entre Jaufré Rudel, un troubadour français, et Clémence, une comtesse, qui ne se sont jamais rencontrés et qui sont séparés par un océan. L’histoire se déroule au XIIe siècle entre l’Occident et l’Orient.
Un pèlerin sert d’intermédiaire entre ces deux personnes jusqu’à ce que le troubadour décide de traverser la mer pour rejoindre cel- le qu’il a imaginée dans ses rêves.
« L’Amour de loin est une oeuvre tout en délicatesse et en envoûtement. C’est un opéra plus contemplatif. La montée dramatique est très lente et très contemplative. Mon pari, c’est de réussir à hypnotiser le spectateur et la technologie que l’on utilise est très envoûtante», a-t-il précisé.
L’océan qui sépare les deux amoureux sera constitué d’un alignement d’une vingtaine de câbles contenant 28 000 lumières DEL et nourris par un flux vidéo, qui reproduiront les différents mouvements de la mer.
INGÉNIERIE
Une passerelle automatisée créée uniquement pour cette production et deux bateaux permettront aux trois chanteurs de se déplacer sur l’eau.
«Les personnages ne touchent jamais le sol. Il n’y a personne sur le plancher. Ils entrent en flottant ou sont transportés par une tour. Il a fallu beaucoup de temps pour penser, programmer et trouver l’ingénierie pour tout ça. Le chanteur est à la merci d’un système qui s’occupe de lui et qui l’amène où il doit être», a-t-il fait savoir.
La musique de Kaija Saariaho, ajoute le metteur en scène, représente beaucoup le mouvement de l’eau, avec des tempêtes, des vagues et le calme.
«C’est pas mal ça, le personnage principal», a-t-il indiqué, précisant que L’Amour de loin est le fruit de deux ans et demi de travail dans les fourneaux d’Ex Machina à Québec.
L’Amour de loin mettra en vedette le baryton Phillip Addis (Jaufré Rudel), la soprano Erin Wall (Clémence), la mezzo-soprano Tamara Mumford (le pèlerin), cinq acrobates-marionnettistes, l’Orchestre symphonique de Québec, sous la direction du chef espagnol Ernest Martinez Izquierdo, et les Choeurs de l’Opéra de Québec. L’Amour de loin est présenté à la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec, dans sa version originale française, le 30 juillet et les 1er, 3 et 5 août, à 20 h.