Le Journal de Montreal - Weekend

DE CALGARY Ã RIO

Quand on lui demande en quoi consiste sa préparatio­n aux Jeux olympiques de Rio, Marie-Josée Turcotte répond en riant : «À faire ma valise!» Après avoir repris son sérieux, la chef d’antenne de Radio-Canada parle d’une «accumulati­on de connaissan­ces et d’

- Marc-André Lemieux Le Journal de Montréal

Est-ce difficile de garder un minimum d’objectivit­é quand on couvre des Jeux olympiques?

On va être honnête : on n’est pas objectif. C’est sûr qu’on a un parti pris pour les athlètes québécois et canadiens. C’est sûr qu’on va être content quand ils vont gagner. Même les gens qui couvrent le hockey ont un parti pris pour une équipe. C’est impossible de faire ce métier pendant des années et côtoyer les athlètes d’aussi près sans perdre une certaine distance par rapport aux événements. J’aime dire qu’on est objectif dans notre subjectivi­té.

Devez-vous faire une cure de sommeil avant de partir pour Rio?

Pas vraiment. Ce qui est bien avec l’expérience, c’est qu’on sait mieux gérer son énergie. C’est la clé. Après mes premiers Jeux à Calgary 1988, j’étais lessivée. Parce qu’on travaille sans arrêt. On parle de journées sans fin de 17-18 heures. Couvrir les Jeux, c’est comme courir un marathon: vers la 12e journée, tu frappes un mur. Heureuseme­nt, avec les années, tu apprends à l’éviter.

Comment la couverture télé des Jeux olympiques a-t-elle évolué au fil des années?

Tout est différent! La technologi­e a tellement évolué. On n’avait pas d’ordinateur quand j’ai commencé. On n’avait même pas de téléphone cellulaire. On lisait des journaux, on lisait des magazines… On allait faire des reportages avec de grosses caméras… Aujourd’hui, c’est un autre monde.

La sécurité doit également avoir passableme­nt changé au fil du temps. Après les nombreuses attaques terroriste­s des derniers mois, est-ce quelque chose qui vous inquiète?

C’est toujours une source d’inquiétude. D’autant plus que toute la planète regarde les Jeux olympiques. C’est donc une cible intéressan­te pour des terroriste­s. Pour dire toute la vérité, j’avais encore plus peur avant de partir pour Sotchi parce qu’il y avait eu des menaces… En 1988 à Calgary, je pense qu’il n’y avait même pas de détecteurs de métal! Mais la même année, à Séoul, c’était autre chose. Il y avait des gens armés partout. Je n’avais jamais vu ça. Ce que j’ai vu de plus contraigna­nt, c’était à Salt Lake City en 2002. Il fallait vraiment prévoir une heure pour passer à travers chacune des étapes de sécurité. À Sotchi, le comité internatio­nal a changé sa façon de faire. C’était vraiment très, très sécurisé, mais une fois qu’on était entré à l’intérieur du périmètre de sécurité, c’était fini: on pouvait se promener partout. C’était beaucoup mieux.

La question impossible : quel est votre plus beau souvenir des Jeux olympiques?

Je suis incapable d’en nommer un. Il y en a tellement... Calgary, c’était mes premiers. C’était fascinant. J’étais comme une enfant dans un magasin de bonbons. Séoul, c’était la première fois que j’allais en Asie. C’était mes premiers Jeux d’été. C’était immense. J’avais l’impression d’être illettrée parce que je ne comprenais pas ce qu’on me disait! Et curieuseme­nt, 10 ans plus tard à Nagano, j’avais l’impression d’être chez moi, même si je ne comprenais pas plus!

Du côté des performanc­es sportives, laquelle évoque les meilleurs souvenirs?

Celle de Kerrin Lee-Gartner aux Jeux olympiques d’Albertvill­e. En 1992, j’étais chef d’antenne l’après-midi et je faisais la descriptio­n du ski alpin féminin le matin. C’est moi qui ai décrit la médaille d’or de Kerrin LeeGartner. À cette époque, des premières positions, c’était rare. J’ai perdu toute objectivit­é durant la descente. Je hurlais en ondes! J’étais emballée! C’était super excitant!

Vous avez reçu l’Ordre du Canada après Sotchi en 2014. Qu’est-ce que cette récompense représente à vos yeux?

C’est un beau cadeau… inattendu! Quand ils m’ont appelée pour m’annoncer la nouvelle, il était 16 h, j’étais au bureau, j’avais des milliers de choses à faire et c’était la folie. Au début, je déconnais parce que j’étais persuadée que c’était une blague. Et quand ils m’ont demandé si j’acceptais, je leur ai répondu que j’étais trop sous le choc pour répondre et que j’avais besoin d’y réfléchir durant la nuit. Ma première pensée est allée à mon père, qui était un ardent séparatist­e et nationalis­te. Mais il était aussi d’une grande ouverture. Il m’aurait probableme­nt dit: «Tu ne peux pas refuser parce que c’est un grand honneur.» ICI Radio-Canada Télé et RDS présentent les Jeux olympiques de Rio du 5 au 21 août.

 ??  ?? Marie-Josée Turcotte s’apprête à aller à Rio pour couvrir ses 14es Jeux olympiques. OCOURTOISI­E
Marie-Josée Turcotte s’apprête à aller à Rio pour couvrir ses 14es Jeux olympiques. OCOURTOISI­E

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