Le Journal de Montreal - Weekend
UN PRIVILÈGE DUREMENT GAGNÉ
Détermination, discipline et rigueur comptent parmi les principes et les valeurs qui constituent la ligne de conduite des athlètes olympiques, mais également celle des musiciens classiques. «Pour faire partie d’un grand orchestre comme l’Orchestre symphon
«Quand j’ai commencé, j’étais très jeune, ajoute-t-elle. Je devais avoir trois ou quatre ans. Enfant, je n’étais pas confinée dans ma salle de travail, mais je dois admettre que la musique demandait beaucoup de discipline. Comme les athlètes, nous investissons des heures et des heures dans la pratique de notre art.»
Même si, depuis la salle, les spectateurs sont portés à croire que les musiciens s’exécutent avec facilité, ces derniers doivent effectuer des mouvements répétitifs et être capables de maintenir certaines postures durant plusieurs heures.
«Être musicien classique, c’est un travail de coeur et d’esprit, mais on oublie souvent que c’est un travail très physique, souligne celle qui dit avoir été capable de répéter huit heures par jour, à une certaine époque. J’ai un devoir de garder une certaine forme physique, ne serait-ce que pour pouvoir soutenir mon instrument.»
«Nous dépensons beaucoup d’énergie, que ce soit mentalement ou sur le plan des mouvements, qui sont très répétitifs, explique le violoncelliste Sylvain Murray, qui en est à sa neuvième saison au sein de l’OSM. Il y a une endurance qui se bâtit, avec les années, mais il faut continuer de s’exercer pour garder la forme. Certains musiciens vont même faire des exercices précis pour pouvoir y arriver.»
RIEN D’ACQUIS
Afin de maintenir le standard d’excellence requis pour faire partie d’un orchestre comme l’OSM, les musiciens ne peuvent se permettre de s’appuyer uniquement sur leur expérience.
«Oui, je vais me permettre de prendre une semaine et demie de vacances par année. Par contre, après quelques jours, il y a un certain manque. Ça devient un peu comme une drogue, explique Marie-André Chevrette. En plus, si on veut garder la forme, pour maintenir le niveau, nous sommes obligés de continuer à répéter. (...) Ce n’est jamais acquis.»
«À ce stade-ci, dans ma carrière, j’ai presque tout joué, mais il y a encore beaucoup de pièces que nous allons présenter qui ne sont pas faciles, nous confie le contrebassiste Eric Chappell, qui a intégré l’OSM en 1999. Durant la Virée classique, par exemple, nous allons jouer la Symphonie no 9 de Beethoven. À mes yeux, c’est la plus belle oeuvre pour orchestre, mais la partition de contrebasse est vraiment complexe. Elle l’est à un niveau tel que je sais qu’elle ne sera jamais facile à jouer, pour moi.»
UN PRIVILÈGE
Après avoir rêvé de devenir des musiciens classiques de haut niveau et avoir travaillé d’arrache-pied pour y parvenir, les membres de l’OSM avec qui nous nous sommes entretenus se considèrent tous privilégiés de faire partie d’un tel ensemble.
«À l’âge de 12 ans, j’ai assisté à un concert avec ma famille et je me souviens d’avoir été vraiment impressionné par le fait que les musiciens, tous ensemble, aient été capables de créer quelque chose d’aussi extraordinaire, évoque Eric Chappell, qui souhaitait déjà jouer pour un grand orchestre, à cette époque. Je ne savais pas, à ce moment-là, si c’était un rêve accessible, pour moi. Mes parents m’ont soutenu et finalement, avec énormément de travail, j’ai réussi à le réaliser.»
«Jouer pour un grand orchestre, ça faisait aussi partie de mes rêves, affirme Marie-André Chevrette, qui se rappelle avoir souhaité jouer avec l’OSM alors qu’elle avait six ou sept ans. Quand on est musicien, cependant, on ne sait jamais où l’on va finir par jouer. Les positions, dans les grands orchestres, se libèrent très rarement. En plus, avec le phénomène de la globalisation, la concurrence est toujours plus forte. Ce n’est pas rare de voir 80 personnes se présenter pour un poste.»
En effet, dans ce milieu hyper compétitif, les musiciens, aussi talentueux soient-ils, doivent se surpasser à un moment bien précis pour arriver à se tailler une place parmi les grands.
«Tu peux être un magnifique musicien, un super technicien, mais si ce jour-là, ça ne va pas bien et quelqu’un d’autre joue mieux que toi, c’est lui qui va gagner, ajoute la violoniste. C’est la même chose avec les athlètes. Ils peuvent avoir remporté des championnats du monde et avoir battu des records, mais s’ils arrivent aux Olympiques et qu’ils ne sont pas au sommet de leur forme, c’est un autre qui va remporter la médaille d’or.»