Le Journal de Montreal - Weekend

LE CHAT SE TRANSPOSE SUR SCÈNE

-

RELAXNEWS | On se souvient de Simone Signoret et Jean Gabin en couple glaçant dans Le Chat au cinéma. Myriam Boyer et Jean Benguigui livrent pour la première fois au théâtre une tout autre version, très humaine, du roman de Simenon.

Sur la scène du théâtre de l’Atelier, à Paris, les deux comédiens dirigés par Didier Long donnent toute sa saveur à l’univers de Georges Simenon, observateu­r aiguisé des différence­s sociales et des caractères humains.

Marguerite, une femme de la bourgeoisi­e provincial­e désargenté­e, et Émile, ancien ouvrier, tous deux veufs, croient unir leurs solitudes en se remariant. Le mariage de ce duo mal assorti tournera au cauchemar, chacun devenant le tortionnai­re de l’autre.

Dans son film (1971), Pierre Granier-Deferre gommait les différence­s sociales, ne retenant que la haine implacable d’un couple ranci, en proie à l’alcoolisme.

Didier Long s’attache au contraire à décrire ses personnage­s en profondeur, racontant par petites touches leur vie passée. Marguerite n’a jamais été aimée, et son coeur «est resté tout petit», dit la comédienne Myriam Boyer. Sa mère est morte quand elle avait trois ans, son père, occupé à dilapider la fortune des biscuits Doise fondés par son grand-père, ne s’est jamais occupé d’elle. Son mari l’a épousée pour sa fortune.

Elle rêve de concerts, «Mozart, Verdi», quand Émile lui propose des westerns au cinéma. Lui a connu l’amour avec sa première femme et a bien tenté «d’apprivoise­r» Marguerite, avant que le fossé se creuse entre eux.

Jean Benguigui est formidable en ouvrier fruste et tendre, face à une Myriam Boyer tout en nuances, tantôt bourgeoise froide tantôt midinette pleine d’espoir. La pièce alterne les épisodes de la rencontre avec ceux de la rancoeur, puis de la «guerre froide», alors que le couple ne communique plus que par petits papiers interposés.

C’est la mort suspecte du chat d’Émile qui déclencher­a la guerre froide, mais, dès les prémisses, tout est en place pour une mécanique implacable de l’échec.

La descente aux enfers s’accompagne de la fin d’un monde: dehors des démolisseu­rs sont à l’oeuvre pour construire un nouveau quartier sur l’ancienne usine des biscuits Doise. Des bruits de chantier menacent à tout moment la petite maison de Marguerite, avec sa cuisine en formica, son salon bourgeois figé dans le passé.

Myriam Boyer relève une nouvelle fois le défi de succéder à Simone Signoret, puisqu’elle a joué 500 fois au théâtre La vie devant soi, où s’était illustrée la grande actrice au cinéma.

 ??  ?? Simone Signoret dans Le Chat. PHOTO COURTOISIE
Simone Signoret dans Le Chat. PHOTO COURTOISIE

Newspapers in French

Newspapers from Canada