Le Journal de Montreal - Weekend
SOUVENIRS DE VOYAGES ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ
L’Inde, désireuse de rattraper la Chine par son économie, y est partiellement parvenue. Mais tandis qu’une partie du pays se modernise, la grande majorité de la population croupit dans la misère et l’arriération, anesthésiée par de multiples religions fatalistes (qui donnent raison à Karl Marx, qui y voyait l’«opium du peuple»).
Ici la pauvreté des laissés-pour-compte s’explique par les vies antérieures. Si les moins que rien de la société expient par leur exécrable condition actuelle des fautes commises au cours de vies précédentes, n’est-il pas juste de NE PAS les aider? Des malades étendus sur le trottoir rendent l’âme sans que quiconque lève le petit doigt. Bref, l’individualisme le plus égoïste sévit davantage dans la très spirituelle Inde que dans n’importe quel pays dit «matérialiste».
L’Inde, la plus grande démocratie du monde, est encore loin de la socialdémocratie qui a le mérite de s’occuper des besoins élémentaires des démunis.
Devant le pitoyable spectacle de la pauvreté dans les rues, on comprend que plusieurs se soient convertis au christianisme dans un souci d’aider leur prochain à la manière de mère Teresa. Cette dernière a droit à toutes sortes d’injures de la part de bien-pensants occidentaux qui salissent sa mémoire en lui reprochant d’avoir davantage soigné les pauvres avec des prières qu’avec des médicaments… Préfère-t-on qu’ils crèvent dans la rue?
Et la femme, là-dedans? À moins de provenir d’une bonne famille, la femme est nettement considérée comme une inférieure. C’est visible dans les rues où elles tiennent des kiosques ou quémandent la main tendue avec un bébé dans les bras, dans les champs où elles labourent (après s’y être rendues dans la benne d’un camion), dans les manufactures où on les sous-paie.
Dans quelques quartiers modernes, la culture occidentale s’impose, avec ses jeans pour elle comme pour lui. Ailleurs, l’habillement traditionnel de la femme demeure. N’est-il pas dommage que les vêtements indiens les plus typiques, les plus beaux, soient associés au passé? Ne serait-ce pas bien si l’Inde entrait dans la modernité sans renoncer à son génie propre?