Le Journal de Montreal - Weekend
L’ÉMOTION AVANT TOUT
Avec un réalisme percutant, en évitant d’être moralisateur, Yan England a choisi d’aborder le problème de l’intimidation à l’école dans son premier long métrage, 1:54. Conscient que le sujet de son film fera jaser, le cinéaste assure qu’il souhaite d’abor
«Oui, mon film parle d’intimidation, mais ce n’est pas un documentaire, précise d’entrée de jeu Yan England au cours d’une entrevue accordée au Journal.
«J’ai voulu aborder mon film comme un thriller psychologique, qui suit le point de vue d’un personnage d’adolescent qui vit des moments difficiles à l’école. Je ne donne pas de réponse et j’ai essayé de ne pas être moralisateur. Si ça provoque des discussions sur le sujet, c’est fantastique. Je ne peux pas demander mieux. Mais l’important pour moi, c’est que le public embarque bien dans l’histoire et vive des émotions.»
Jusqu’à présent, on peut dire que Yan England a réussi son pari. Présenté en première mondiale en août dernier au festival d’Angoulême, dans le sud-ouest de la France, la carrière de 1:54 a débuté sur les chapeaux de roue en remportant le prix du jury étudiant et le prix du meilleur acteur (remis à Antoine Olivier Pilon). Le film sortira d’ailleurs en France au printemps prochain.
Mettant en vedette Antoine-Olivier Pilon, Sophie Nélisse, David Boutin et Lou-Pascal Tremblay, 1:54 suit le quotidien de Tim (Pilon), un adolescent de 16 ans qui a le malheur d’être devenu la tête de Turc de plusieurs de ses camarades de classe. Doué pour la course à pied, il décidera de s’entraîner à fond pour une importante compétition qui pourrait lui permettre de prendre sa revanche.
«Il n’en peut plus de se faire achaler à l’école et il se tourne vers la course pour battre son grand rival. Le film suit sa quête pour devenir quelqu’un et s’imposer dans sa dernière année au secondaire, résume Yan England qui avait obtenu une nomination aux Oscars il y a trois ans avec son court métrage Henry.
AUTHENTICITÉ
En situant l’action de 1:54 dans une école secondaire, Yan England a d’abord voulu que son film soit le plus authentique possible. C’est donc par souci de réalisme qu’il a tourné dans une vraie école de Longueuil, en utilisant les vrais étudiants de l’établissement comme figurants.
«Dans les scènes de lunch, par exemple, j’ai placé mes acteurs au milieu de la cafétéria qui est remplie de 1000 étudiants de l’école. Ça nous a permis d’avoir le pouls de la vie à l’école, explique-t-il.
«J’ai aussi fait des recherches sur le sujet. Mais c’est aussi des milieux que je connais très bien. J’ai fait de la compétition sportive toute ma vie. J’ai fait de la course quand j’étais plus jeune et j’ai fait de la compétition en natation et en tennis.
«Je connais aussi les milieux scolaires parce qu’avec mon métier d’acteur et d’animateur, je me suis toujours beaucoup impliqué auprès des jeunes. J’ai entraîné une équipe de natation pendant des années et j’ai souvent donné des conférences dans les écoles. Ce sont des milieux que je connais bien.»
Pour bien comprendre le phénomène de l’intimidation, Yan England est aussi allé à la rencontre d’experts, de professeurs et de jeunes qui ont vécu ce problème. Son film permet notamment de constater à quel point l’intimidation fait des ravages par l’entremise des réseaux sociaux.
«Avec les réseaux sociaux, l’intimidation te suit partout, souligne le réalisateur. Avant, ça se passait juste à l’école ou dans la cour de récréation. Maintenant, tu peux te faire intimider sur Facebook, Twitter ou par textos. Et ça, c’est 24 heures sur 24, parce que ça te suit sur ton téléphone partout où tu es.»
Le film 1:54 prend l’affiche partout au Québec le 13 octobre.