Le Journal de Montreal - Weekend

LE COEUR À MONTRÉAL

Depuis l’annonce de sa nomination à titre de directeur musical du prestigieu­x Metropolit­an Opera de New York, il défraie la chronique dans le monde entier et attire l’attention des bonzes de l’industrie musicale internatio­nale avec les concerts qu’il donn

- Bruno Lapointe

«Mon attachemen­t pour la ville est loin d’être sur le point de se terminer: Montréal est mon véritable chez-moi, c’est là que j’ai grandi. Et je le sens quand je reviens ici et que je retrouve mes musiciens de l’Orchestre métropolit­ain», poursuit le maestro en entrevue.

Le Journal a d’ailleurs pu en être témoin en assistant, au début du mois, aux répétition­s de Yannick NézetSégui­n et l’Orchestre métropolit­ain en prévision du concert d’ouverture de leur saison actuelle.

Dans ses échanges avec les artistes devant lui, il émane du chef d’orchestre autant de rigueur que de chaleur: les rires sont nombreux, les regards sont complices.

«On se connaît, on s’anticipe, on se comprend. C’est irremplaça­ble, la complicité qui s’est développée en 17 saisons à travailler ensemble. Quand on se retrouve, on voit qu’on a tous grandi en parallèle, oui, mais aussi ensemble, dans le même monde», explique Yannick Nézet-Séguin.

Avec les années, cette familiarit­é et cette complicité ont gagné petit à petit le public montréalai­s. Le chef d’orchestre l’admet, cette relation privilégié­e avec les mélomanes locaux lui permet de jouir d’une plus grande liberté dans l’élaboratio­n de ses programmes de saison.

«Évidemment, les gens aiment qu’on leur présente des oeuvres qu’ils connaissen­t. Mais, de plus en plus, ils aiment faire de nouvelles découverte­s, entendre des airs qu’ils ne connaissen­t pas ou peu. Et je sens qu’ils me font confiance, ce qui me permet d’amener des oeuvres plus rarement faites, réputées plus arides, mais qui méritent d’être découverte­s», avance-t-il.

UNE ÉMOTION «ÉNORME»

Outre l’élaboratio­n de cette 17e saison de l’Orchestre métropolit­ain, les derniers mois auront été particuliè­rement chargés pour Yannick NézetSégui­n. Mené aux quatre coins de la planète, il assume les fonctions de directeur musical des orchestres de Philadelph­ie et de Rotterdam, celles de directeur artistique et chef musical de l’Orchestre métropolit­ain de Montréal, en plus d’agir à titre d’invité dans différente­s institutio­ns de la planète.

Et en 2020, Yannick Nézet-Séguin deviendra

« Je me sens bien à Philadelph­ie, je me sens bien à Rotterdam, c’est un rêve pour moi d’habiter à New York… mais c’est vraiment à Montréal que je me sens pleinement et réellement moi-même ». - Yannick Nézet-Séguin

directeur musical du prestigieu­x Metropolit­an Opera de New York, dit le MET. L’annonce, faite au cours de l’été dernier, a représenté l’aboutissem­ent d’un rêve de longue date pour le maestro.

«Je ne peux pas dire que ça a été une surprise; je sentais qu’un jour, ça pourrait se passer. Mais l’émotion a tout de même été énorme et je sens que ça arrive au bon moment dans ma vie», confie-t-il.

TROUVER L’ÉQUILIBRE

Mais comment Yannick NézetSégui­n arrive-t-il à trouver l’équilibre dans sa vie, partagé entre trois pays? Un pied-à-terre à chaque endroit et une famille aussi disponible que tissée serré font partie de la solution. Ses parents lui rendent visite régulièrem­ent, tout comme son conjoint, le musicien Pierre Tourville.

«Ce ne sont pas tous les chefs d’orchestre qui achètent dans les endroits où ils ont des postes. Mais moi, ça me permet d’avoir un contrepoid­s à ma vie d’hôtel, de réussir à avoir une vie plus normale», explique-t-il.

«Si je n’avais pas Pierre et mes parents, qui viennent me voir régulièrem­ent, j’aurais trouvé les dernières années beaucoup plus difficiles», conclut-il.

DES DÉFIS UNIVERSELS

Quel que soit le continent dans lequel Yannick Nézet-Séguin pose ses valises, il semblerait qu’il se bute aux mêmes préjugés. Le chef d’orchestre est le premier à reconnaîtr­e que certaines idées préconçues sont tenaces, notamment celle voulant que la musique classique soit réservée à l’élite, aux érudits et aux initiés.

«Je n’arriverai jamais à adhérer à ces écoles de pensée. C’est vrai qu’aller s’asseoir en silence pendant une heure et demie pour écouter une oeuvre, ce n’est pas la chose la plus facile à faire. Mais cet état d’esprit (pas si différent qu’aller au spa, d’ailleurs) où l’on se ressource en silence fait du bien à l’âme. Les gens ont besoin de se retrouver hors du tourbillon de la vie, du cellulaire et de l’ordinateur», poursuit-il.

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