Le Journal de Montreal - Weekend
QUE FAUT-IL FAIRE AVEC LE STREAMING ?
Dans un nouveau documentaire diffusé à Télé-Québec, Ariane Moffatt et Louis-Jean Cormier abordent la problématique de l’écoute en continu (streaming) et les défis qui se présentent pour l’avenir de l’industrie de la musique.
Réalisateur de plusieurs vidéoclips (Karkwa, Stéphanie Lapointe, Ariane Moffatt, Florence K), Dominique Laurence a décidé de se pencher sur le phénomène du streaming dans le documentaire La musique à tout prix.
Pendant 60 minutes, l’émission donne la parole à plusieurs intervenants de l’industrie (musiciens, producteurs, agents d’artiste, politiciens). Le documentaire, coscénarisé par Dominique Laurence et Tristan Malavoy, est mené par Ariane Moffatt et Louis-Jean Cormier.
«J’ai accepté de faire le documentaire parce que c’était l’occasion pour moi d’enfin plonger dans le contenu de ce sujet assez complexe», dit Ariane Moffatt au Journal.
L’auteure-compositrice est bien au fait des problèmes de l’industrie de la musique, elle qui a fait ses débuts à l’aube des années 2000, alors que les albums se vendaient encore très bien.
«Il y avait encore moyen d’avoir une longévité dans ta carrière, dit-elle. Je suis ensuite entrée dans la transformation de cette industrie. Nous sommes dans une grande période de changements, tant dans la façon de consommer que de mettre en marché la musique.»
MODÈLE ÉCONOMIQUE
En regardant La musique à tout prix, on constate assez rapidement que le sujet de l’écoute en continu est très complexe. Il est très difficile de savoir combien rapporte une seule écoute d’une chanson en ligne, tant les variables sont nombreuses.
Membre d’Alfa Rococo, David Bussières a fait l’exercice pour les biens du documentaire avec sa chanson Lumière, qui a été un top 5 à la radio.
«La chanson a rapporté 17 279,76 $ pour la radio, soit 2,88 $ par spin [NDLR: par diffusion. Donc environ 6000 diffusions]. Pour YouTube, avec 60 000 visionnements, nous avons reçu 151,37 $. Et pour Spotify, avec 30 000 streams, ç’a rapporté 8,50 $. Dans notre cas, un stream a donc payé 0,00028 $.»
Pour Ariane Moffatt, il est évident que le modèle économique actuel doit être repensé. «Je ne suis pas en train de dire que le streaming n’est pas bon. Je l’utilise moimême. Mais ce n’est pas parce que tu es écouté aux quatre coins du monde que ça va se transformer en revenus.» Selon elle, il y a toutefois moyen d’être optimiste.
GÉOLOCALISATION
Dans le documentaire, Louis-Jean Cormier apprend que le Canada compte réviser la Loi sur le droit d’auteur l’an prochain.
«Je veux vraiment avoir une conversation avec les artistes et tous les intervenants de l’industrie pour repenser complètement le système», explique la ministre fédérale du Patrimoine canadien, Mélanie Joly.
En ce qui concerne les plateformes d’écoute en continu, comme Spotify et Apple Music, la ministre aimerait qu’il y ait de la géolocalisation automatique sur ces services. Ainsi, les gens qui seraient de passage au Québec, par exemple, auraient accès plus facilement aux artistes d’ici.
«La géolocalisation est une bonne idée, renchérit Ariane Moffatt. En ce moment, le talent local francophone ne peut pas vraiment rayonner sur ces plateformes, car il est noyé dans 40 millions de chansons anglophones.»
Récemment, l’ADISQ a lancé un cri d’alarme par rapport à la problématique du streaming. Questionnée sur cette sortie, Ariane Moffatt précise que l’ADISQ représente les producteurs et non les artistes.
«Ce que je déplore, c’est qu’ils ont demandé 15 millions au gouvernement et que dans ce montant-là, il n’y a rien qui est adressé directement aux artistes.»
La chanteuse mentionne que ce sont les artistes eux-mêmes qui devront aussi se mobiliser pour espérer changer la situation. «Il faut arrêter de rester chacun de notre bord et d’avoir des constats défaitistes.» Le documentaire La musique à tout prix sera diffusé lundi, à 21 h, à TéléQuébec. Des rediffusions sont aussi prévues les 28 et 30 octobre. Pour plus d’infos: telequebec.tv.