Le Journal de Montreal - Weekend
CASEY AFFLECK AU SOMMET DE SON ART
Peut-on réellement passer outre la mort de ceux qu’on aime et vivre?
Il y a des personnes qu’on enterre, puis dont on apprend à se passer, en l’absence de qui on recommence néanmoins à palpiter. Puis, il y a les autres. Ceux qui laissent un trou béant, un vide qui ne peut se combler et qu’on ne veut pas remplir ni remplacer.
Manchester by the Sea, dans lequel le talent de Casey Affleck explose en mille et une facettes de douleur contenue, de regrets, de rage, de colère, de bonheur fugace, traite de ce sujet intemporel, universel, douloureux, vivant.
Lee Chandler (Casey Affleck) est l’homme à tout faire d’un propriétaire d’immeubles à logements. Peu loquace, voire bourru, il évite tout contact humain et se limite aux interactions sociales qu’il lui faut minimalement maintenir. Lorsqu’il apprend que son frère Joe (Kyle Chandler) vient de faire une crise cardiaque, il se rend dans la ville de Manchester-by-the-Sea au Massachusetts, bourgade qu’il a quittée il y a des années, pour y apprendre son décès.
Le réalisateur et scénariste Kenneth Lonergan (l’excellent Tu peux compter
sur moi sorti en 2000) s’applique ensuite à montrer les raisons de ce départ et les circonstances qui ont fait de Lee ce qu’il est devenu. En articulant le long métrage autour de la relation de Lee et de Patrick (Lucas Hedges, impressionnant) son neveu adolescent, dont il devient le tuteur après la mort de son frère, le cinéaste tisse une toile émotive dans laquelle le protagoniste se débat tant bien que mal.
JEU DE QUALITÉ
Soutenu par des acteurs secondaires – Michelle Williams incarne son ex-épouse, elle aussi écorchée vive – à sa mesure, Casey Affleck trouve enfin ici un rôle lui permettant d’exploiter tout son potentiel dramatique, et qui lui permettra sans nul doute d’obtenir une nomination aux Oscars. Tour à tour déchiré, enragé, indifférent, l’acteur de 41 ans fait siennes, et donc nôtres, les violences et turbulences émotives de son personnage.
Loin d’être un long métrage douloureux, Manchester by the Sea demeure, par la grâce de Kenneth Lonergan, une histoire magnifiquement humaine dans laquelle l’amour sous toutes ses formes occupe le premier plan.