Le Journal de Montreal - Weekend
SEULS AU MILIEU DU MONDE
C’est en observant des gens seuls dans un endroit bondé, au milieu d’une foire alimentaire, que Dans un food court a pris forme. Tout en questionnant l’esprit d’individualité qui règne dans ce genre de lieu public, on souhaite donner la parole aux solitai
C’était un 23 décembre. L’achalandage dans les centres commerciaux est à son comble et Marie Fannie Guay, créatrice de la pièce, est interpellée par une image qui se dessine devant elle. «J’ai vu un homme gros et seul à une table qui mangeait un hamburger» à la foire alimentaire, se souvient-elle. «J’ai trouvé cela si triste que j’en ai eu les larmes aux yeux.»
À partir de là, le thème de la solitude dans les endroits publics a été exploité afin d’en faire une création originale.
La créatrice s’est également penchée sur la genèse de ces fameuses foires alimentaires, qui ont néanmoins une vocation très pratique. «Au départ, lorsqu’ils ont été intégrés dans les centres commerciaux, on voulait des pôles d’activités sociales où les marchands pouvaient échanger avec les clients», explique Marie Fannie Guay, qui assure également la mise en scène de sa pièce avec Solo Fugère. «Il y avait une volonté de rassemblement. Les food court sont, en quelque sorte, des descendants des marchés romains et des foires médiévales.» Loin du but initial, on constate plutôt que ces endroits impersonnels n’ont rien de rassembleur.
LIEU DE DÉSOLATION
Consciente qu’il s’agit d’un symbole de notre société nord-américaine, Marie Fannie Guay considère ces food court désolants. «C’est un lieu fascinant de désolation», déplore-t-elle. «Un endroit où l’on mange devrait être rassembleur et convivial.» La metteure en scène a aussi fait le constat de l’immanquable présence de kiosques de Loto-Québec situés, la plupart du temps, à quelques mètres des aires de restauration. «On y voit des gens âgés, seuls avec leurs billets à gratter», ajoute-t-elle. Composée d’une série de tableaux, la pièce démontrera cette triste réalité sur une scène ressemblant à une typique foire alimentaire.
GRANDES CONFIDENCES
Marie Fannie Guay souhaite également, avec sa pièce, donner la parole aux gens qui fréquentent les aires de restauration. Pour ce faire, on s’est inspiré de Chaque automne j’ai envie de mourir, un recueil de monologues de Véronique Côté et Steve Gagnon. «Ce sont des textes créés à partir d’une confidence», souligne Marie Fannie Guay. «On partait d’une unique phrase qui se voulait une confidence pour ensuite créer une histoire.»
On a donc conçu des histoires qui pourraient appartenir à ces gens qui fréquentent les foires alimentaires, souhaitant au passage tisser le fil rassembleur d'une communauté.