Le Journal de Montreal - Weekend
LE TROPICANA ET LA RIVALITÉ ENTRE LA HAVANE ET MONTRÉAL
La Havane était une rivale de Montréal pendant la prohibition. Par ailleurs, on a déjà eu l’expression «Havane du Nord» pour qualifier notre métropole. Voilà qui était plus sexy que «ville aux cent clochers»!
Et si Cuba a eu Castro pour faire le ménage dans ses bordels et ses casinos, nous avons eu Drapeau et «Pax» Plante! Contrairement à chez nous, La Havane a encore aujourd’hui un grand cabaret à l’ancienne avec ses musiciens et ses danseurs. Le Tropicana existe depuis 1939 et n’a pas cessé d’attirer des milliers de visiteurs étrangers, sauf pendant les périodes de fermeture révolutionnaire.
Aller à Cuba et ne pas se payer un spectacle aussi frappant, c’est rater quelque chose d’essentiellement professionnel et cubain. C’est là qu’on prend conscience de l’énergie excessive: de la musique excessive, des filles et des gars excessifs, etc. Cette troupe de danse hautement professionnelle nous en donne pour notre argent et nous fait voyager dans le temps d’avant que la télévision tue le cabaret.
À titre d’exemple, si l’on pense que ce spectacle au Tropicana coûte une fortune, comparativement à Montréal, c’est une aubaine. Les billets vont de 70 $ sans repas à 150 $ (avec). J’ai opté pour le forfait compromis à 100 $, comprenant des grignotines, du champagne et une bouteille de rhum. Si de jeunes propriétaires de bars montréalais aiment imiter l’époque de la prohibition, à Cuba, ce n’est pas du toc: les lieux de l’époque ont été préservés. Ce spectacle rappelle les grands cabarets français qui, par ailleurs, l’ont inspiré, comme le Moulin rouge ou le Lido, à Paris. Malheureusement, toute la période où Montréal rivalisait de gaieté et de folichonnerie avec La Havane s’est perdue. On en garde trace dans les archives photographiques de Montréal. Pour conclure, j’aimerais continuer le parallèle entre La Havane et Montréal. Même si le maire Camillien Houde ne s’est jamais enrichi à la manière frauduleuse d’un Batista, il tolérait le côté «pas permis» qui apportait des retombées touristiques immenses à Montréal. Souvenons-nous de la rue Sainte-Catherine avec ses milliers de néons; époque révolue… sauf à Cuba, où la fête continue.