Le Journal de Montreal - Weekend
DE COIFFEUR À STAR
L’auteur-compositeur-interprète Bonsa a raflé, le 27 avril, le premier prix des Syli d’Or, le concours-vitrine de la relève en musique world organisé par Nuits d’Afrique. Un couronnement inattendu pour celui qui a été coiffeur à Ouagadougou, chanteur de RnB, apprenti d’un maître griot et star de la musique traditionnelle burkinabè.
Les rues de Fada N’Gourma vibraient parfois au son d’une musique surprenante. Dans cette ville située à 220 km à l’est de Ouagadougou, au Burkina Faso, se trouvait un singulier salon de coiffure, qui déversait du Bobby Brown ou du R. Kelly dans les oreilles de ses clients. «Tout le monde m’appelait R. Kelly! J’avais vraiment un amour pour la musique occidentale», raconte Bonsa Toun’wanzè.
Né en 1978 au Burkina Faso, Bonsa a grandi au Ghana et a voyagé à travers le Niger, le Togo, la Libye et la Mauritanie avant de remettre les pieds dans son pays natal. Le coiffeur mélomane a connu un grand succès au début des années 2000, au sein du duo rap Negramers. «J’étais considéré comme “l’artiste burkinabè”. On me collait un drapeau, mais ma musique n’y correspondait pas», constate-t-il.
GRIOT ET CÉLÉBRITÉ
Bonsa décide alors de tout quitter. Le 7 août 2004, il laisse Ouagadougou derrière et se rend dans un village perdu. Là, il fait la rencontre de Biri, cultivateur bissa et maître griot qui lui apprend à jouer la koanni, guitare traditionnelle des paysans du Burkina Faso. «Je suis parti quatre ans, sans revenir. Je cultivais la terre manuellement, et dans les pauses, Biri somnolait avec son chapeau sur les yeux et me corrigeait à la moindre erreur», se souvient-il en riant.
Il surprend ses fans à son retour en 2008, apparaissant à la télé en habit traditionnel, bien loin du R. Kelly que tous connaissaient. Un album a suivi, puis des tournées effrénées en Europe et en Afrique, un tourbillon qui l’amène à poser le pied à Montréal en décembre 2016. «Ma copine est Canadienne et ça a été long avant qu’elle arrive à me convaincre de venir, parce que j’avais trop peur du froid», rigole-t-il.
Bonsa s’est entouré de musiciens de talent, dont Sébastien Pilon et Pavel Maximytchev, et n’a eu qu’un mois pour se préparer en vue des Syli d’Or. Sa victoire lui assure de pouvoir enregistrer un nouvel album avec ses comparses. Séduit par l’accueil des gens, le musicien souhaite rester au Canada jusqu’à son dernier jour. Celui qui craignait l’hiver s’est même acheté un manteau.