Le Journal de Montreal - Weekend

ISHIGAKI, LES CARAÏBES DU JAPON

ISHIGAKI, Japon | Amarré au port de l’île d’Ishigaki, située à l’extrême sud du Japon, Hiroyuki Tanaka prépare son bateau pour sa prochaine sortie dans les eaux poissonneu­ses de la mer de Chine orientale.

- Danny Vear

Avec ses collègues, il se rappelle quelques histoires de pêche. La meilleure? Celle de Yoji Gushiken, un pêcheur de 60 ans qui a ramené au bout de sa ligne un gigantesqu­e thon de 400 kilos. «Il était gros. C’est une fortune sur le marché», explique monsieur Tanaka.

Prospère centre de pêche commercial­e, Ishikagi, c’est un peu comme une île des Caraïbes transplant­ée au Japon.

À trois heures de vol de Tokyo et à une heure de Naha, capitale d’Okinawa, ce paradis tropical abrite une végétation luxuriante, parsemée de palmiers, de bananiers, de bougainvil­lées et d’hibiscus. Les eaux turquoise cristallin­es découpent le littoral parsemé de plages de sable blanc, peu fréquentée­s avant l’ouverture officielle de la saison à la mi-avril.

Intégrée à l’économie japonaise, l’île compte sur des infrastruc­tures modernes et ses 45 000 habitants jouissent d’une qualité de vie enviable.

Mais les pêcheurs d’Ishigaki ont connu de meilleurs jours. Leurs territoire­s de pêche ont rétréci depuis 2014. À la suite d’incidents avec des bateaux chinois, ils ont dû abandonner les eaux au nord d’Ishigaki, près des îles de Senkaku, propriétés du Japon, mais convoitées par la Chine. «Nous n’y allons plus», explique monsieur Tanaka.

INDUSTRIE TOURISTIQU­E

Par la force des choses, Ishigaki compte sur le tourisme pour diversifie­r son économie.

Avec son aéroport tout neuf, ouvert en 2013, l’île peut recevoir des visiteurs plus nombreux en provenance des grandes villes du Japon, de Hong Kong et de Taïwan. Avec un yen moins fort, les Japonais préfèrent voyager chez eux. Ishigaki en bénéficie.

«Les gens de Tokyo et d’Osaka aiment le calme qu’ils retrouvent ici. Ils quittent un temps le stress du travail et de la vie rapide. Ils accordent leur rythme à celui de l’île. Ils prennent le temps de décrocher», explique le maire Yoshitaka Nakayama. Natif de l’endroit, l’homme de 50 ans a fait le chemin inverse pour étudier et travailler un temps dans deux grandes villes japonaises, à Osaka et à Kitakyushu. Puis il est revenu. «C’est parfait pour les familles. C’est un des rares endroits au Japon à connaître une croissance démographi­que», dit-il.

PLAGES

Ici, rien ne presse. Un séjour à Ishigaki se déroule dans la tranquilli­té et les amoureux de la nature y sont bien servis.

Magnifique­s, les plages accueillen­t les baigneurs tout en les invitant à la prudence avec des panneaux d’alerte au tsunami. Les plages de Sukuji et de la côte Yonehara sont les plus belles. On pourrait y marcher, les pieds dans le sable fin, pendant des heures. Les fortes vagues se brisent au loin. En un coup d’oeil, on comprend pourquoi l’île est un endroit prisé des amateurs de surf.

Une des attraction­s touristiqu­es les plus populaires de l’île se trouve dans la baie de Kabira. Grâce à des bateaux munis d’un plancher de verre, on peut y observer des dizaines d’espèces de poissons tropicaux qui se cachent dans les bancs de coraux.

Les randonneur­s ne sont pas en reste. Ils peuvent emprunter les sentiers abrupts des monts Nosoko et Omoto, les deux plus hauts sommets de l’île, qui offrent de jolis points d’observatio­n sur les petites îles qui entourent Ishigaki, coeur de l’archipel de Yaeyama.

SÉCURITÉ

La pêche et le tourisme ne sont pas les seules activités au centre de l’économie d’Ishigaki.

Bien amarrés aux nouvelles installati­ons du port, une douzaine de vaisseaux de la Garde côtière japonaise se sont ajoutés aux bateaux de pêcheurs et aux traversier­s occasionne­ls.

Depuis un an, l’organisme responsabl­e de la sécurité maritime du Japon a accru sa présence à Ishigaki: près de 600 membres y sont postés.

C’est que le Japon est inquiet de l’activité chinoise près des îles Senkaku, situées à 170 kilomètres au nord d’Ishigaki. Depuis septembre 2012, des bateaux chinois n’ont pas hésité à franchir la frontière maritime pour naviguer dans les eaux japonaises, à une fréquence moyenne de trois incidents par mois. La Chine s’intéresse de près à ces îles perdues (qu’elle a rebaptisée­s «Diaoyu») pour des raisons stratégiqu­es.

Ce conflit larvé se déroule sous l’oeil attentif des États-Unis. Installés à Okina-

wa depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, la base américaine et ses 50 000 soldats assurent toujours le maintien de la sécurité dans la région. «La situation rappelle l’importance de la présence américaine», explique Yoshiyuki Toita, conseiller élu de l’île, responsabl­e du dossier.

Pendant que la Garde côtière patrouille les eaux litigieuse­s, Ishigaki et ses habitants vivent à un rythme bien tranquille.

Les pêcheurs préfèrent éviter les tensions et naviguent dans les eaux calmes au sud de l’île. «C’est mieux pour la pêche», dit monsieur Tanaka.

– Notre journalist­e était l’invité de la ville d’Ishigaki et du Centre de la presse étrangère du Japon.

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La baie de Kabira est une des lieux touristiqu­es les plus courus de l’île.
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Hiroyuki Tanaka prépare son bâteau amarré au port d’Ishigaki.
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Pêcheur de 60 ans, Yoji Gushiken a tiré de l’eau un thon de 400 kilos, évalué à 15000$ sur le marché.

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