Le Journal de Montreal - Weekend

L’AFFAIRE JONBENET COMME VOUS NE L’AVEZ JAMAIS VUE

Après le succès de Making a Murderer et Amanda Knox, Netflix s’intéresse à une autre affaire criminelle qui a défrayé la chronique aux États-Unis: le meurtre horrible de la petite reine de beauté JonBenet Ramsey en 1996. Mais Casting JonBenet n’est pas vr

- Malik Cocherel Collaborat­ion spéciale Casting JonBenet est accessible sur Netflix.

Mais qui a tué JonBenet Ramsey? Plus de 20 ans après la découverte du corps de la petite fille de 6 ans dans le sous-sol de sa maison de Boulder au Colorado, le mystère reste entier et l’affaire passionne toujours autant l’Amérique. Plusieurs personnes ont été suspectées du meurtre – dont les parents de la fillette, John et Patsy Ramsey, et le grand-frère de JonBenet, Burke – sans jamais être condamnées. En 2006, un pédophile, John Mark Karr, a confessé le meurtre, avant d’être relâché parce que son ADN ne correspond­ait pas à celui retrouvé sur le corps de la victime. Aujourd’hui, le coupable n’a toujours pas été formelleme­nt identifié.

Dans Casting JonBenet, la réalisatri­ce Kitty Green ne cherche pas à retrouver le meurtrier, mais plutôt à porter un regard original sur ce crime sordide. «Ce qui m’intéressai­t, c’était surtout de voir pourquoi cette affaire fascinait toujours autant l’Amérique après toutes ces années, plutôt que le crime en lui-même», a expliqué l’Australien­ne en entrevue avec Le Journal.

TROUBLANT ET CHOQUANT

Pendant 15 mois, Kitty Green a auditionné dans le Colorado des dizaines d’acteurs et actrices pour jouer les différents protagonis­tes de l’affaire, dans une reconstitu­tion du crime et de l’enquête qui a suivi. Ce sont ces auditions qu’elle nous présente dans Casting JonBenet, sachant qu’elle n’a jamais eu l’intention de faire un film sur le meurtre de la petite reine de beauté. «Les personnes qui ont passé les auditions étaient au courant dès le départ. Je leur ai dit qu’on allait se baser essentiell­ement sur les auditions pour jouer avec les codes du documentai­re criminel, et renouveler un peu le genre.»

Cette démarche artistique et décalée peut parfois choquer. Comme lorsque des enfants se mettent à taper de toutes leurs forces sur des melons d’eau pour se glisser dans la peau du grand frère, Burke, suspecté d’avoir frappé JonBenet à la tête. Alors que l’affaire ne se prête pas vraiment à la comédie, on se surprend aussi à rire, devant un adepte de BDSM qui se met à faire une démonstrat­ion de fouets en pleine audition pour le rôle du chef de la police de Boulder. «C’est une histoire tellement sombre qu’on a aussi besoin d’humour, s’est défendue Kitty Green. Avoir ces petits moments plus légers et drôles, c’est nécessaire pour pouvoir supporter le côté très glauque de ce crime.»

UN COUPABLE À PLUSIEURS VISAGES

Mais le plus intéressan­t, c’est de voir les personnes auditionné­es donner leur avis très personnel sur l’affaire, alors que beaucoup d’entre elles vivaient dans la région au moment du drame et connaissai­ent, de près ou de loin, les Ramsey. Certaines sont convaincue­s de la culpabilit­é de la mère, Patsy, en s’appuyant sur l’étrange demande de rançon qu’elle aurait écrite de sa main pour faire croire à un enlèvement et maquiller son crime. D’autres estiment que le père, John, a pu agresser sexuelleme­nt sa fille avant de la tuer. D’autres encore évoquent leur expérience de parents pour essayer de comprendre ce qui a pu se passer chez les Ramsey cette triste nuit du 24 décembre 1996.

Quand on lui demande si elle a aussi un avis sur la question, la réalisatri­ce refuse néanmoins de prendre position. «Je préfère poser des questions plutôt que d’apporter des réponses. S’il n’y a pas eu de condamnati­on jusque-là, c’est parce qu’il y a trop de zones d’ombre dans cette affaire. Donc je pense qu’il ne sert à rien de faire des spéculatio­ns. Il est plus intéressan­t de montrer comment une communauté peut se reconstrui­re et continuer à vivre avec cette tragédie, en sachant qu’on ne retrouvera sans doute jamais le meurtrier.»

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