Le Journal de Montreal - Weekend
RACISTE, MOI?
Les succès-surprises comme celui que Get Out a connu en salle récemment sont d’une rareté telle qu’ils se comptent sur les doigts d’une seule main. Quelle a été la cause de ce succès, qui paraît en DVD cette semaine? Sa qualité, bien sûr. Cela dit, plusieurs ont vu dans cette variation originale sur le racisme en sourdine un portrait saisissant de l’Amérique trumpienne, déchirée de l’intérieur. Ça donne à réfléchir. Pour nous y aider, quelques variations sur le même thème, tout aussi percutantes, peuplées de racistes qui s’ignorent.
CRASH 3
À sa manière habile et intelligente de mener de front plusieurs intrigues qui s’enchevêtrent durant une journée dans le Los Angeles cosmopolite contemporain, le Canadien Paul Haggis dresse un portrait nuancé des malaises qui rongent la société américaine: racisme, violence, individualisme, etc. Optant pour un ton mélancolique, renforcé par la musique envoûtante de Mark Isham, le film (qui a reçu l’oscar du meilleur film de 2005) contient sa part de scènes émouvantes, et d’autres fort tendues. Au sein d’une distribution de haut niveau, Don Cheadle incarne la conscience de cette triste faune urbaine.
LA HAINE 3
Dans des HLM en banlieue de Paris, un jeune juif agressif et deux de ses amis promènent leur désoeuvrement dans les rues, toujours prêts à l’affrontement. Construit avec une rigueur et une précision exemplaires, ce triomphe populaire signé Matthieu Kassovitz expose de façon nuancée le mécanisme qui engendre un tel climat de méfiance et de haine entre des jeunes à l’avenir bouché et des forces de l’ordre trop promptes à réagir à la moindre provocation. Le recours judicieux au noir et blanc contribue à créer un climat d’oppression et d’hyperréalisme.
LE NÈG 3
Robert Morin (Requiem pour un beau sans-coeur) se livre à une virulente dénonciation du racisme et de la bêtise humaine dans un Québec profond un peu trop replié sur lui-même. De fait, son approche frontale, crue et sans concession de ce désolant phénomène – la destruction d’un nègre de jardin par un jeune Noir – risque de rendre inconfortables certains spectateurs. Fruit d’un patient travail d’improvisation, le jeu d’ensemble sonne étonnamment juste, réservant plusieurs moments savoureux, gracieuseté de Robin Aubert et Emmanuel Bilodeau.
LA PIZZERIA EN FOLIE 3
Durant une canicule, les exploitants italiens d’une pizzeria de Brooklyn provoquent l’agressivité des Noirs du quartier. Tout en décrivant avec acuité et une bonne dose de pittoresque la vie d’un quartier noir, Spike Lee (Malcolm X) laisse comprendre comment une étincelle peut provoquer un incident regrettable. L’approche, pour énergique qu’elle soit, reste pourtant ambiguë, ce qui a contribué à la légende ce ce film sorti en 1989.