Le Journal de Montreal - Weekend
QUAND CASSEY AFFLECK SE MET UN DRAP SUR LA TÊTE
En cette époque d’effets spéciaux démesurés, Une histoire de fantôme, la nouvelle proposition de David Lowery, fait jaser. Car Casey Affleck y joue un homme mort qui vient hanter sa veuve, incarnée par Rooney Mara, avec pour seul accessoire un drap blanc…
L’idée originale d’Une histoire de fantôme est née dans l’esprit de David Lowery juste après une dispute avec sa femme, la réalisatrice Augustine Frizzell. Elle voulait qu’ils aillent s’installer à Los Angeles tandis que lui n’avait pas envie de quitter le Texas.
« J’ai réalisé que je n’avais pas du tout envie de quitter cette maison. J’étais complètement déprimé, notre lit n’était plus là et nous dormions par terre, a-t-il expliqué à Indiewire lors de la présentation de son film au Festival de Sundance en début d’année. Pourtant, je me disais que j’aimais toujours cet endroit et que je ne voulais pas en partir. Je me suis demandé ce qui se passerait si nous restions. Je reconnais qu’il s’agit là d’un défaut de m’attacher à quelque chose d’aussi éphémère. Nous en étions locataires ! Nous n’étions même pas propriétaires. Et cette maison est très semblable à celle qu’on voit dans le film. »
Dans le long métrage, C (Casey Affleck) tente de communiquer avec M, sa veuve, après sa mort. « C’est la première fois que je fais un film qui est aussi personnel. Évidemment, j’emploie ce terme de manière imagée puisqu’il s’agit d’un film sur un fantôme en drap blanc. Pourtant, je me suis inspiré, non pas d’événements concrets de ma vie, mais d’événements émotionnels. Tout ce qu’on y voit est profondément ancré dans ma propre expérience. Je ne suis pas mort. Je n’ai pas connu le deuil […], mais tout est profondément ancré dans mes peurs et mes questionnements. Certains dialogues sont ceux que j’ai eus avec ma femme. J’ai d’ailleurs traité le film comme une espèce de thérapie », a-t-il confié.
UN SIMPLE DRAP BLANC
Le plus surprenant est sans conteste le fait qu’au lieu d’avoir recours à des images de synthèse ou à des effets spéciaux par ordinateur, David Lowery a demandé à Casey Affleck de se couvrir d’un drap blanc des pieds à la tête, ne laissant que deux trous à la place des yeux.
« Je voulais employer cette image depuis plusieurs années, mais je n’avais pas de film dans lequel l’utiliser. C’est une image forte parce que nous l’associons à l’enfance et à l’Halloween. C’est également une image naïve, charmante et qui évoque le“fait maison ”. En même temps, elle évoque un fantôme, quelqu’un qui est mort et qui ne peut quitter la Terre pour une raison. Il y a tellement de significations derrière cette image enfantine très simple et j’ai adoré l’idée de la prendre et d’y insuffler une certaine gravité », a-t-il détaillé au Hollywood Reporter.
UNE BONNE DOSE DE PATIENCE
Or, les idées les plus simples étant les plus complexes à exécuter, il a fallu au cinéaste, à son acteur et à sa costumière, une bonne dose de patience et d’inventivité.
« Ma costumière, Annell Brodeur, a fait des tests avec différents tissus pour le drap… qui n’était même pas un drap , a précisé le réalisateur. Il faut savoir qu’un drap d’un lit très grand format ne couvre pas quelqu’un en entier, car il fallait un certain poids pour que les plis tombent de manière parfaite. Autrement, nous avons eu également recours à l’art des marionnettistes de manière à ce que les yeux restent au même endroit et ne tombent pas lorsqu’il tourne la tête. Parfois, il avait l’air d’un éléphant avec une trompe ! Et, dans la majorité des scènes, notre équipe des costumes se trouvait juste sous le cadre de manière à tenir le drap en place. Ainsi, le visage a maintenu cette simplicité qui n’en demeure pas moins très émotive. »
Une histoire de fantôme hantera les cinémas dès le 4 août.