Le Journal de Montreal - Weekend
LES JEUX DE L’AMOUR ET DE L’ARGENT
Ceux qui ont vu Wall Street : l’argent ne dort jamais se souviennent de la scène où Gordon Gekko explique à Jacob que la Tulipomanie a été la première bulle spéculative de l’histoire de la finance. C’est ce sujet qu’aborde Tulip Fever, mêlant à cette fièvre monétaire des histoires d’amour « contaminées » par ce désir de faire de l’argent.
Drame historique réalisé par Justin Chadwick, Tulip Fever est tiré du roman éponyme de Deborah Moggach, prolifique auteure britannique. Raconté par Maria (Holliday Grainger) en voix hors champ, le long métrage de 107 minutes suit Sophia (Alicia Vikander), orpheline qui épouse Cornelis Sandvoort (Christoph Waltz) afin de permettre à ses frères et soeurs de rallier de nouveau le continent américain. Car nous sommes en 1631, à Amsterdam, aux Pays-Bas, époque à laquelle les femmes n’ont quasiment aucun droit.
Le mariage n’est ni heureux ni malheureux — Sophia n’aime pas Cornelis, même si elle éprouve pour lui de l’affection née de leur vie commune —, la jeune femme se contente de son sort. Une ombre pèse néanmoins sur cette union, Sophia ne parvenant pas à donner un fils à son époux.
C’est dans cette atmosphère vaguement malsaine que Cornelis décide d’embaucher Jan Van Loos (Dane DeHaan), peintre de son état, afin qu’il réalise le portrait du couple. Et Sophia et Jan tombent éperdument amoureux l’un de l’autre.
RÉFÉRENCES HISTORIQUES
Le film, qui a mis 20 ans à voir le jour, est truffé de références historiques passionnantes, tels les détails de la Tulipomanie ou encore l’explication du prix élevé de l’aigue-marine, teinture de vêtements la plus rare. Sachant que Deborah Moggach a contribué au scénario, on imagine donc sans peine l’amplitude de détails du roman. Ce foisonnement se traduit, à l’écran dans les décors de la demeure de Cornelis et Sophia, les costumes, les scènes d’extérieur le long des canaux et du port d’Amsterdam, la taverne dans laquelle se tiennent les enchères des bulbes de tulipes (fleur originaire d’Espagne, d’Afrique du Nord et du Levant), les femmes qui fument une espèce de pipe, l’importation des épices orientales qui font des Pays-Bas la première puissance européenne de l’époque, etc.
Dans ce Tulip Fever peuplé de personnages secondaires, les cinéphiles reconnaîtront Zach Galifianakis en ami de Jan, Judi Dench en abbesse, Cara Delevingne en spéculatrice, Tom Hollander en médecin, Kevin McKidd en homme d’affaires… et même Cressida Bonas, l’ex petite amie du prince Harry.
Les amateurs de films historiques y trouveront de quoi piquer leur curiosité (et se plonger dans le roman) et les amateurs d’histoires d’amour tragiques apprécieront le sort de Maria, Sophia, Jan et Cornelis.