Le Journal de Montreal - Weekend

L’ ACTUALITÉ VUE PAR GUY NANTEL

Depuis le début de sa carrière, Guy Nantel se fait un point d’honneur de rire des différents sujets de l’actualité. Le Journal lui a demandé ce qu’il pensait notamment du travail de Donald Trump, des élections municipale­s, du référendum en Catalogne et de

- RAPHAEL GENDRON-MARTIN Le Journal de Montréal raphael.gendron-martin @quebecorme­dia.com

Comment évalues-tu le travail de Donald Trump depuis son arrivée à la Maison-Blanche ?

« C’est sûr qu’on lui reproche plein d’affaires et je n’ai pas de compliment­s à lui faire. Mais pour moi, il n’est que la quintessen­ce de la société dans laquelle on vit en ce moment, c’est-à-dire l’image, le spectacle. Les gens ont horreur que tu leur présentes un politicien qui est hyper compétent, un très bon gestionnai­re. Ce qu’ils veulent maintenant, ce sont des gens qui ont une grande gueule. S’ils peuvent être beaux, c’est tant mieux, même si je ne pense pas que ça s’adresse à Trump ! Mais c’est un plus. Mélanie Joly, Trudeau, Trump, pour moi, c’est toute la même affaire. C’est du spectacle. Il faut que tu séduises l’électorat. Ça n’a plus rien à avoir avec la performanc­e de gestionnai­re étatique que tu peux offrir. C’est le dernier du souci du monde. »

As-tu fêté le 375e de Montréal ?

« Je n’ai vu aucune différence, à part le pont Jacques-Cartier qui est éclairé toute la nuit. Moi, je trouve ça super beau. Il y a plein de monde qui déteste l’idée. Ça arrive tellement régulièrem­ent que je revienne à Montréal la nuit. Et que j’arrive de la 20 ou de la 10, je trouve ça fabuleux. Il y en a qui disent qu’on aurait dû mettre l’argent ailleurs. Mais gérer une ville, c’est un peu comme gérer une famille. Il faut que tu mettes un peu d’argent sur la nourriture, le chauffage, le linge et les sorties. Dans une vie équilibrée, ça prend un peu de tout ça. Si tu veux devenir une grande ville dans le monde, ce sont des gestes comme ça qui te mettent “sur la map”. Sinon on n’aurait pas eu Expo 67, les Jeux olympiques et un paquet d’autres affaires. »

« À part le pont éclairé, je n’ai rien retenu du 375e. C’est même pas un vrai anniversai­re, en plus ! »

Comment vois-tu les prochaines années pour Montréal ?

« Je suis un vrai Montréalai­s. Je suis né à Montréal et j’ai vécu toute ma vie à Montréal. C’est une ville que j’aime beaucoup. Je trouve que l’on dit souvent que Montréal, c’est laid, c’est sale. J’ai beaucoup voyagé. J’ai fait 60 pays dans ma vie. Montréal, je trouve ça beau, accueillan­t et sympathiqu­e comme ville. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas de choses à corriger. Évidemment, la circulatio­n, c’est complèteme­nt ridicule. »

« Globalemen­t, je suis très optimiste dans la vie. Je trouve que ça va bien ici, au Québec, en général, et à Montréal. Est-ce qu’il y a des choses à corriger et améliorer ? Plein. Mais il faut rester calme aussi dans ça. Je suis un peu tanné d’entendre que Montréal est de la marde. Allez vivre ailleurs ! Le territoire est grand si vous n’êtes pas contents de tous les inconvénie­nts. »

Que penses-tu des élections municipale­s de cet automne ?

« À Montréal, je pense que Denis Coderre va être aisément élu. C’est un gars qui a ses gros défauts, mais c’est un personnage tellement fort. On parlait de Trump et du spectacle politique. Denis Coderre et Régis Labeaume, à notre échelle à nous, c’est aussi du spectacle politique. Mais Coderre s’est impliqué dans beaucoup de dossiers. Il est très présent à la télévision. Quand t’es omniprésen­t, forcément je vois mal comment quelqu’un d’autre pourrait le déloger. »

Qu’as-tu pensé du référendum en Catalogne et des débordemen­ts qui ont suivi ?

« Je n’ai pas compris le recul de la Catalogne. La brèche était ouverte. C’est comme s’ils disaient aux gens qui ont mangé des coups de matraque dans la face : “Vous l’avez fait pour rien parce que le référendum ne compte pas.” »

« Les gens mélangent le concept de souveraine­té et d’indépendan­ce. Pour moi, la souveraine­té, c’est un concept beaucoup plus universel. Tu n’es pas obligé de te séparer pour devenir souverain. Et ce n’est certaineme­nt pas aux autres de décider pour toi. Pour moi, la souveraine­té, c’est la capacité pour un peuple de s’autodéterm­iner et de prendre ses propres décisions. »

« J’ai écrit un livre là-dessus qui sort dans quelques jours. On ne fait pas de lancement officiel, on va juste le vendre à la fin des shows. Ce sont mes réflexions sur le Québec actuel. C’est un livre sérieux, il n’y a pas de blagues. Ça va s’appeler Je me souviens… de

rien. C’est à la fois social, politique, économique, historique. Je ratisse à tous les niveaux. »

« À la fin des shows, les gens me disent tout le temps que je dois aller en politique et me demandent ma vision du Québec. Ce livre, c’est la version sérieuse du show. Tout est là-dedans. J’ai l’impression que ça va faire jaser. »

Les menaces de guerre nucléaire avec la Corée du Nord te font-elles peur ?

« Il y a eu la crise des missiles en 2006. Les gens l’oublient. Je prends ça avec un grain de sel parce que je me dis que tout peut arriver. Mais ce sont [Donald Trump et Kim Jong-un] deux coqs assez incompéten­ts, deux grandes gueules. Ce ne sont pas des génies de la politique ni de stratégie militaire. L’Occident n’a pas d’intérêt à aller conquérir la Corée. Il n’y a pas de pétrole, par exemple. Et la Corée est protégée par la Chine. Ce serait donc un gros risque à prendre, de la part de l’Occident, d’aller attaquer la Corée. Maintenant la question c’est : quand t’as deux idiots qui sont à la tête de pays aussi puissants, qui va être raisonnabl­e là-dedans ? Je ne sais pas. »

Le cas de censure aux Olivier, l’an dernier, et le procès de Mike Ward te font-ils hésiter lorsque tu écris de nouvelles blagues ?

« J’ai zéro inquiétude pour moi, dans la mesure où je suis prêt à tout. Je sais qu’il y a de plus en plus de lois et de gens qui nous surveillen­t. Mais à un moment donné, si le prix à payer est de ne plus jamais faire de télé ou qu’il y ait moins de gens qui viennent me voir, je suis prêt à vivre avec ça. Si ça m’occasionne des poursuites, on les paiera, si c’est d’aller en prison, on ira. L’histoire jugera si c’était pertinent ou non. »

« Je ne suis pas du tout le gars qui dit que la liberté d’expression te donne le droit de tout dire. Mais les lois existent déjà là-dessus aux niveaux civil et criminel. Les gens mélangent l’éthique et le légal. Tu peux très bien être légal et ne pas être éthique. C’est un peu ça, l’humour, mordre dans quelque chose, être un peu baveux. »

« Je n’ai jamais eu de mises en demeure officielle­s, j’ai eu des avertissem­ents. J’ai souvent eu des menaces, des courriels. La police s’en est même mêlée une couple de fois. Je suis prêt à vivre avec. Je ne retirerai jamais quelque chose parce que je reçois une mise en demeure. Je dis au monde : vous perdez votre temps. Faites tout de suite votre poursuite. »

Comment vois-tu le succès actuel de Denis Villeneuve, un ancien participan­t de La Course..., comme toi ?

« Je ne suis pas étonné. Denis était l’un des meilleurs candidats de l’histoire de La Course [Denis a fait La Course Europe-Asie en 1990-1991 et Guy a fait La Course

Destinatio­n Monde en 1993-1994]. Même à l’époque, on le voyait vraiment comme le futur Denys Arcand. Je ne pensais pas qu’il irait aussi loin et aussi vite que ça. C’est sûr que c’est une grande fierté pour La Course et ceux qui l’ont fait. »

« En même temps, je trouve que ç’aurait pu être mieux récupéré que ça, les gens qui ont fait La

Course. Il y avait vraiment de grands artistes, ç’a été une émission extraordin­aire. Mais je trouve qu’on ne voit plus beaucoup de gens qui ont fait La Course, aujourd’hui. »

Tes vidéos de vox pop sont très populaires depuis plusieurs années. Est-ce que cela a un impact sur tes ventes de billets ?

« J’en ai aucune idée. Je le fais essentiell­ement pour “rester en vie”, je dirais. Quand t’es pendant un an et demi sans faire de show, c’est une façon de rester vivant comme artiste. Je n’ai l’impression de changer le monde ni positiveme­nt ni négativeme­nt. C’est assez léger et banal comme affaire. »

« Mon objectif avec ça n’est rien d’autre que de faire parler, susciter la controvers­e, provoquer. Ça marche. Ce qui est intéressan­t de ça, c’est que ceux qui adorent les vox pop se l’envoient et ceux qui me détestent se l’envoient aussi. Ils ne peuvent pas s’empêcher de le visionner ! »

« Par contre, je ne veux pas devenir “Monsieur vox pop” dans la tête du monde non plus. J’essaie vraiment d’espacer ça le plus possible, parce que tout le monde me demande ça, de faire un vox pop. Il n’y a pas une semaine qui passe sans qu’on me le demande. Tout le monde me demande de leur faire des vox pop pour leur festival, leur corpo, des pubs télé, leur produit, leur journal. La réponse, c’est non, parce qu’on ne veut pas commercial­iser ça. »

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