Le Journal de Montreal - Weekend

FORMIDABLE HISTOIRE D’AMOUR

- MARIE-FRANCE BORNAIS

L’acteur et scénariste américain d’origine irlandaise Karl Geary, le Tommy de la série Sex and the City, a connu un triomphe en Angleterre cet automne avec son premier roman, Vera. En cours de traduction dans une dizaine de langues, il s’est retrouvé dans la première sélection du prix Fémina. Et pour cause : l’histoire d’amour qu’il raconte est magnifiée par sa très belle plume.

Karl Geary a imaginé Sonny, un jeune Irlandais de 16 ans qui rêve d’ailleurs. Lorsqu’il croise le regard de Vera, sa beauté lui donne le vertige. Il oublie tous ses soucis, tout de son quotidien, et ne pense plus qu’à cette femme qui ne dit jamais son âge.

Vera parle peu, mais sait écouter. Ils vivront ensemble une histoire intense et dévastatri­ce. On sait qu’ils se dirigent droit vers un mur, mais la puissance émotive de leur histoire – révélée par la plume de l’auteur – est magnifique.

Karl Geary, connu davantage comme acteur, est super heureux de constater que son roman a été aussi bien accueilli. « J’ai écrit mon premier livre au début de la vingtaine, avant même d’être acteur. Il était horrible. Terrible. Mais ça m’a servi d’apprentiss­age pour l’écriture. Par la suite, j’ai bifurqué vers le travail d’acteur. Ça m’a beaucoup plu, mais je continuais toujours d’écrire. Je pense que ce que je cherchais, pendant tout ce temps, c’était de trouver la voix juste, celle qui me convenait. [...] Secrètemen­t, je me suis toujours vu comme un écrivain. »

Il adore ce métier qui compte son lot de défis. « Ce qui est extrêmemen­t difficile dans l’écriture, c’est cet exil forcé de la vie quotidienn­e. On transporte ces vies secrètes qui commencent à vivre plus que notre propre vie. »

Pour Vera, Karl a dû trouver la voix parfaite. « C’était facile... mais je me suis compliqué la vie, parce que le narratif s’est présenté au “tu”, ce que j’ai rejeté d’emblée. C’est très difficile à maintenir tout le long du roman. J’ai réessayé au “je”, puis avec un narrateur omniscient, et ça ne fonctionna­it pas. Il fallait créer plus d’intimité. Le “tu” permettait la confession autant que l’accusation. »

ÉCRIT À MONTRÉAL

Karl Geary raconte qu’il a terminé Vera à Montréal. « Je vivais à New York à l’époque et, par moments, j’avais besoin de m’immerger dans un autre univers. Alors, je prenais un train Amtrack pour Montréal. C’était merveilleu­x parce que je ne parle pas français. C’était une manière de me pousser plus loin : quand on a de la difficulté à communique­r avec les gens d’une manière efficace pendant quelques jours, des choses nouvelles nous apparaisse­nt. Montréal a été très efficace pour moi et j’ai adoré mon expérience. »

Karl est-il près du personnage de Sonny ? « C’est intéressan­t : d’une certaine manière, je me reconnais quelquefoi­s dans Sonny, d’autres fois dans Vera, d’autres fois dans Sharon ou dans les personnage­s de la boucherie. Ils sont tous moi, en quelque sorte. »

« Mais Sonny est-il moi ? Comme on décrit quelque chose qui est un souvenir, c’est forcément un mensonge, parce que c’est vu à travers nos propres filtres. Par contre, je peux dire que Dublin dans les années 1980, je connais ça. Les gens ne passaient pas facilement d’une classe sociale à l’autre, d’un groupe d’âge à un autre, d’une profession à une autre. Ce dont bénéficiai­t Sonny, c’était ce dont je bénéficiai­s aussi : peu de choses, en vérité. »

Karl Geary, acteur, écrivain et scénariste, a joué dans de nombreux films et séries, dont Sex and the City.

Vera, son premier roman, est en cours de traduction dans une dizaine de pays. Il faisait partie de la première sélection du prix Fémina 2017 - Romans étrangers.

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