Le Journal de Montreal - Weekend
ROMAN NOIR AU COEUR DE MONTRÉAL
Après avoir dévoilé les dessous des « roaring twenties », la folie des années 20, Marie-Eve Bourassa fait entrer ses lecteurs dans l’atmosphère enfumée des boîtes de spectacle et dans les dédales du crime organisé des « dirty thirties », les années 30 mar
Eugène Duchamp avait mis de côté ses activités de détective et se faisait, avec son ami Herb Parker, un petit pactole grâce à la contrebande d’alcool. Lorsque la célèbre danseuse Carole Morgan – tout juste couronnée Miss Montréal – est retrouvée étranglée, Duchamp reprend du service. La police est convaincue que c’est Herb Parker qui a fait le coup. Mais pas lui.
Marie-Eve Bourassa a vécu de très bons moments à la suite de l’écriture de cette trilogie, qui a été très bien accueillie, tant par les lecteurs que par les médias. « Les gens aiment beaucoup le personnage et c’est une belle expérience, c’est vraiment génial ! » commente-t-elle.
Les recherches nécessaires pour asseoir son intrigue lui ont démontré que la vie à Montréal était loin d’être facile dans les années 30. « Le livre se passe en 1933, ce qui a été la pire année à Montréal », explique-t-elle en entrevue. « C’était très difficile, il y avait beaucoup de misère. Les gens survivaient... c’est pour ça que je voulais parler du jeu parce que c’était, pour plusieurs, la seule façon de pouvoir continuer à croire qu’il y avait une solution. Ils allaient jouer leur maigre paye et pendant deux secondes, ils avaient l’illusion que les choses pouvaient s’améliorer... »
UNE MINE D’INFORMATIONS
Ses recherches l’ont menée, entre autres, au Centre d’histoire de Montréal, « une vraie source pour les trois livres ». L’exposition Scandale ! lui a donné une bonne idée du centreville à l’époque, et notamment du Red Light. « J’ai fait énormément de lecture aussi, évidemment. J’ai lu des livres sur le jazz à Montréal et des vieux exemplaires de La Patrie. Les journaux, c’était une mine d’informations. »
Marie-Eve note que la scène jazz était très vivante à Montréal pendant la Prohibition. « Je parle entre autres de Rockhead, qui a été le premier Noir à avoir un permis d’alcool... et on ne lui a pas fait la vie facile. Les grands jazzmen américains aimaient beaucoup jouer à Montréal : c’était une scène dynamique, très vivante. » Avec le personnage d’Eugène, l’auteure souhaitait aussi faire un petit clin d’oeil aux romans noirs des années 1930 et leurs auteurs, comme Raymond Chandler et Dashiell Hammett. « Il y a toujours des personnages de détectives ou d’enquêteurs qui fonctionnent avec leurs propres règles : ils évoluent dans un monde qui est corrompu et même ce qui est supposé être droit, comme la police, est corrompu. Il y a la loi d’un côté, et les bandits de l’autre. Pour moi, c’était très important que mon personnage ait des bonnes zones de gris. Parmi tous mes personnages, il n’y en a pas d’ailleurs qui sont purement méchants. »
LE MONDE DU SPECTACLE
Après avoir parlé de prostitution et de crime organisé dans les deux premiers tomes, elle souhaitait explorer davantage l’industrie de la scène, le monde du spectacle, les clubs, dans le troisième. « Je voulais aussi parler de la Crise. J’ai décidé de mettre l’action plus tard – il y a neuf ans qui se passent entre le deuxième et le troisième tome –, mais je voulais amener mon personnage ailleurs. C’est aussi un hommage à la scène jazz de Montréal de ce temps. »
Marie-Eve Bourassa est rédactrice pour plusieurs publications et tient une chronique sur les cocktails à la télévision de Radio-Canada.
Elle a reçu le prix Arthur-Ellis 2017 du meilleur roman policier canadien en français et le prix Jacques-Mayer 2016 de la Société du roman policier de Saint-Pacôme pour Adieu, Mignonne, le premier tome de Red Light.
Son livre Élixir, publié chez VLB Éditeur en 2014, a été finaliste du prix Marcel-Couture.
Elle travaille déjà sur un autre projet, un drame de guerre qui se passe pendant la Première Guerre mondiale.