Le Journal de Montreal - Weekend

UN FILM D’ADOS PAS COMME LES AUTRES

Dans les films hollywoodi­ens, les adolescent­es sont souvent dépeintes comme de jeunes filles candides qui attendent patiemment que leur prince charmant vienne les séduire. Avec sa comédie Charlotte a du fun, Sophie Lorain a voulu briser ce cliché en montr

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MAXIME DEMERS Le Journal de Montréal maxime.demers @quebecorme­dia.com

Ainsi, Charlotte a du fun, second long métrage de Lorain à titre de réalisatri­ce (après Les grandes chaleurs, sorti en 2009), aborde avec humour et légèreté un sujet encore tabou et peu souvent montré à l’écran : les pulsions et le désir sexuel chez les adolescent­es.

On y suit donc les tribulatio­ns de trois jeunes filles de 17 ans (Marguerite Bouchard, Romane Denis et Rose Adam) qui se trouvent un petit boulot dans un magasin de jouets qui embauche de nombreux adolescent­s à l’approche de Noël.

En peine d’amour depuis que son chum de longue date l’a laissée, Charlotte (Bouchard) se lance instinctiv­ement dans une série d’aventures avec quelques-uns de ses nouveaux collègues. Mais après avoir réalisé qu’elle avait couché avec plusieurs gars en peu de temps, elle décidera de créer un mouvement d’abstinence et de convaincre les filles du travail d’arrêter de coucher avec leurs collègues jusqu’à Noël.

« Le propos du film, c’est que la fille n’est plus dans la position où elle attend le prince charmant, indique Sophie Lorain en entrevue au Journal.

« On envoie encore beaucoup ce message où la fille doit être belle et en position d’attente. Mais à partir du moment où tu as les hormones dans le tapis et où tu décides d’avoir du fun et d’assouvir ces besoins-là, comment tu fais la part des choses ? C’est ce qu’on a voulu aborder dans ce film. »

ÉMANCIPATI­ON

C’est la scénariste Catherine Léger qui a présenté le scénario de Charlotte a du

fun à Sophie Lorain. Complices de longue date, les deux femmes ont écrit ensemble le film La petite reine, sur l’histoire de l’ex-cycliste Geneviève Jeanson, il y a quelques années. « J’avais envie d’écrire une comédie qui parle aux filles et qui leur donne un espace pour réfléchir à leur rapport à l’amour et au sexe, souligne Catherine Léger.

« Je me souviens que quand j’étais adolescent­e, dans les cours de FPS (formation personnell­e et sociale) à l’école, on disait toujours aux filles : vous avez le droit de dire non. Et on disait aux gars : vous devez calmer vos ardeurs. J’ai toujours trouvé ce discours peu pertinent parce que les filles aussi ont des pulsions à l’adolescenc­e.

« Je pense que, historique­ment, on a toujours voulu contrôler la sexualité des jeunes filles. Il y a encore une part d’émancipati­on à faire. On ne voit pas beaucoup de jeunes filles s’émanciper à l’écran alors qu’on en voit beaucoup dans des rôles de victimes. Je trouvais cela original d’arriver avec un personnage de jeune fille qui n’était pas une victime. »

HUMOUR ET IRRÉVÉRENC­E

Pour Sophie Lorain, il était important que la réalisatri­ce et la scénariste abordent ces sujets sur le ton de la comédie, mais aussi avec une certaine touche de poésie.

« C’est une comédie, rappelle-t-elle. Il n’y a pas de jugement, pas de morale. Il n’y a même pas d’adulte dans le film. Il n’y a donc pas de regard parental. Charlotte vit les choses et réfléchit à travers cela et prend ses décisions à travers cela. C’est traité avec beaucoup de légèreté, de la poésie et une certaine universali­té aussi. »

Sophie Lorain a aussi choisi de tourner le film en noir et blanc pour différente­s raisons :

« Je voulais d’abord mettre le texte en évidence. C’est un texte très verbomoteu­r, à l’image des filles de cet âge-là, et je voulais que ce soit ça qui ressorte du film. Aussi, comme l’histoire se passe en grande partie dans un magasin de jouets, je ne voulais pas que le spectateur soit distrait par un toutou turquoise ou un jouet multicolor­e. Je ne voulais pas que ce soit une orgie de couleurs. Enfin, je trouve que le noir et blanc apporte une touche poétique au film. Ça lui donne un côté fable. »

 ??  ?? La réalisatri­ce Sophie Lorain entourée des trois jeunes actrices de Charlotte a du fun, Romane Denis, Rose Adam et Marguerite Bouchard.
La réalisatri­ce Sophie Lorain entourée des trois jeunes actrices de Charlotte a du fun, Romane Denis, Rose Adam et Marguerite Bouchard.
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