Le Journal de Montreal - Weekend

Fascinée par la vieillesse

Sortie de l’école il y a bientôt 20 ans, Fanny Mallette a tâté de la réalisatio­n en nous présentant, l’année dernière, un court métrage qui explorait la vie à ses deux extrémités. Mère de trois enfants de 16, 12 et 8 ans, l’interprète de Julie Beauchemin

- Fanny Mallette

Fanny, un mot sur l’excellente quatrième saison de Mensonges. Es-tu heureuse du résultat ?

Oui. C’est comme si nous commencion­s une nouvelle trilogie. On retrouve les mêmes personnage­s, mais dans un autre contexte. Le traitement aussi est différent. Le mensonge est encore plus à la base de nos méthodes de travail. Pendant les enquêtes de mon personnage, on me disait à quel point Julie est ratoureuse... Je la défends. Puisqu’elle est là pour arrêter les criminels, toutes les méthodes pour parvenir à ses fins sont valables. Il arrive que nos personnage­s prennent des décisions qui nous dépassent, mais ça demeure une fiction et je suis là pour servir une oeuvre. Nous nous parlons beaucoup, l’auteur et moi. Je dois faire en sorte qu’on croie à mon personnage. Je dois être vraie et juste.

As-tu d’autres projets à l’horizon ?

Je ferai la promotion du film L’amour, de Marc Bisaillon. Je suis en attente de financemen­t pour un court métrage que je réaliserai. J’en ai déjà fait un avec mes sous, Le dernier mardi. Ce projet a été rendu possible parce que des gens y ont travaillé bénévoleme­nt. Sinon, je n’y serais jamais arrivée. J’ai pu compter sur deux actrices, Françoise Faucher et Emmanuelle Lussier-Martinez. Le lieu de tournage, c’était chez ma mère. Ça faisait longtemps que je voulais réaliser. Je suis une actrice et une mère de famille, c’est ce qui a toujours primé, mais j’ai toujours continué à travailler sur mes projets. Lorsque mon petit a commencé la maternelle, ça m’a donné la possibilit­é de mettre en oeuvre mon court métrage. J’ai été chanceuse.

Depuis quand fais-tu ce métier ?

Ça fait 20 ans que je suis sortie de l’École nationale de théâtre, mais j’ai débuté à 17 ans. J’ai arrêté pendant quatre ans, le temps où je suis allée à l’école. J’ai récemment été invitée aux Enfants de la télé. On a ressorti des tournages auxquels j’ai participé en sortant de l’école. J’y ai l’air d’avoir 15 ans. On a l’impression d’être jeune, jusqu’à ce qu’on regarde des images d’il y a 15 ou 20 ans. On constate alors comme le temps a passé...

Ton printemps semble allégé sur le plan profession­nel. Comment mets-tu ce temps à profit ?

Comme j’écris, mes journées sont bien remplies. Je reste active sur le plan créatif. Je m’occupe de mes enfants. Les trois sont à l’école ; j’ai donc du temps. Ce temps est précieux et je me l’accorde, car c’est une partie de moi qui existe et qui a besoin de s’exprimer.

Comment ça se passe avec ton adolescent ?

Très bien. Je me rappelle l’époque de mes 16 ans. La montée d’hormones est terminée, on est plus relaxe. La liberté est devant nous. On est pas mal plus libre à 16 ans qu’on l’est à 12... C’est une période difficile, mais c’est quand même une belle période. On a parfois l’impression que, parce qu’on n’a plus à changer leurs couches ou à les emmener à l’école, nos enfants n’ont plus besoin de nous, mais il ne faut pas les lâcher. Ils ont besoin de nous d’une autre manière. Il y a beaucoup de discussion­s. J’aime ça, car je n’ai pas l’impression d’être si loin de ma propre adolescenc­e. Je me souviens surtout de mes états d’âme. Je pense être une bonne mère d’adolescent.

Leur ouverture à la vie t’inspire ?

Oui. Ils sont beaux, les jeunes! C’est sûr qu’en tant que parents, nos défis sont différents. À chaque génération, ses enjeux. Faire face à la technologi­e, ce n’est pas évident. Je ne suis pas née avec ça. Il faut l’apprendre pour mieux les comprendre. Comme actrice, j’ai la chance de travailler avec des gens de toutes les génération­s. Je m’intéresse à ce qu’ils ont à dire. J’aime jaser avec eux, apprendre d’eux. J’aime la vieillesse.

Qu’est-ce qui te séduit dans cette période de la vie ?

Depuis que je suis toute petite, je suis fascinée par la vieillesse. C’est un sujet que j’ai traité dans mon premier court métrage et que j’ai envie de traiter au moyen de l’écriture. On voit peu de personnes âgées et, quand on en voit, on tente de camoufler certaines choses. J’ai filmé Françoise Faucher en très gros plan, sans aucun maquillage. Elle avait 86 ans au moment du tournage. Pourquoi disons-nous qu’il se désagrège alors que le corps qui vieillit gagne quelque chose ? Dans le visage de Françoise Faucher, par exemple, sont inscrits plein de mots. Je trouve ça tellement beau ! Jaser avec des gens de cette génération, c’est très enrichissa­nt. J’ai autant à apprendre d’eux que de la génération de mes enfants.

D’où te vient ce lien ?

J’ai beaucoup aimé ma grand-mère maternelle, qui est morte lorsque j’avais 18 ans, mais je ne sais pas d’où ça me vient. Même à l’école, j’aimais avoir des professeur­s plus âgés. J’aimais leur manière de me raconter leur parcours. Je me souviens entre autres d’avoir eu Rita Lafontaine comme professeur. Elle n’était pas vieille, mais, pour la jeune fille de 20 ans que j’étais, elle avait un parcours plus riche que le mien.

C’est la transmissi­on qui t’intéresse ?

Oui. Je trouve que c’est un thème fascinant. On montre beaucoup la transmissi­on père-fils à l’écran. On voit très peu de femmes vieillissa­ntes, même si on voit de plus en plus de femmes dans la cinquantai­ne. Ce n’est pas un plaidoyer, mais ça m’interpelle. Cette partie de la vie m’intéresse. Je n’ai pas hâte d’y arriver, mais je sais que je vais y parvenir un jour, si tout va bien.

Mensonges, mercredi 21 h, à addikTV.

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