Le Journal de Montreal - Weekend
REVOIR L’AFRIQUE
Qui aurait pu prédire, il y a un an à peine, qu’un blockbuster centré sur des personnages issus du continent noir obtiendrait un succès populaire planétaire? C’est pourtant ce qui s’est produit avec Panthère noire, un film de superhéros qui, par son intrigue et ses personnages blacks, remet (enfin!) le modèle du genre sur la table à dessin. Et si on faisait pareil avec l’Afrique, en s’inspirant de visions atypiques de ce continent sous-représenté au cinéma? Risquons la chose...
3 REBELLE
« Je ne sais pas si le Bon Dieu va me donner assez de force pour t’aimer », déclare en voix off l’héroïne à l’enfant qu’elle porte dans son ventre. Ainsi s’amorce Rebelle, un drame poignant signé Kim Nguyen (Regard sur Juliette) dont l’action est campée dans un pays d’Afrique noire anonyme déchiré par la guerre civile. Articulé au moyen de
flash-backs, le récit – qui suit le destin d’une enfant soldat (émouvante Rachel Mwanza) – faiblit légèrement en son milieu, puis reprend son souffle pour nous conduire vers un dénouement d’une puissante sobriété, porteur d’espoir.
3 TSOTSI
Le Sud-Africain Gavin Hood met en lumière une réalité sud-africaine méconnue dans ce drame sur la misère et l’exclusion modulé par l’éveil au sens moral d’un délinquant du ghetto, qui ramène chez lui le bébé qui se trouvait sur la banquette arrière de la voiture qu’il a volée. Tsotsi est une oeuvre pudique, au naturalisme âpre. La mise en scène sobre, mesurée, aux accents poétiques, est au service de l’émotion intérieure du héros, dont le visage, d’abord fermé, s’ouvre à mesure qu’il reconnaît son destin dans celui du poupon.
3 LA CONSTANCE DU JARDINIER
La Constance du jardinier mérite de figurer parmi les meilleures adaptations des romans de John Le Carré. L’intrigue – un diplomate britannique en poste au Kenya (Ralph Fiennes) cherche à découvrir pourquoi son épouse militante a été assassinée – offre un mélange prenant de
thriller et de drame sentimental, sur fond de dénonciation virulente de l’exploitation de l’Afrique par l’Occident. Dans la continuité stylistique de son précédent Cité de Dieu, le Brésilien Fernando Meirelles exploite de façon expressive le contexte africain.
2 COUP DE TORCHON
En 1981, Bertrand Tavernier a transposé avec succès dans l’Afrique équatoriale d’avantguerre un roman américain de Jim Thompson campé en Floride. Résultat: Coup de
torchon, dont la mise en scène précise et vigoureuse exprime une vision amère de l’aventure humaine à travers le personnage de justicier campé par le formidable Philippe Noiret, flic bonasse et servile qui soudain décide de faire le ménage en employant la manière forte. Il s’agit sans doute du film le plus exemplaire sur le phénomène du colonialisme.