Le Journal de Montreal - Weekend

ROMAN D’HORREUR SUR L’ESCLAVAGE MODERNE

- MARIE-FRANCE BORNAIS

Dans son nouveau roman traduit en français, Dans la cave, l’écrivaine Minette Walters, grande dame du roman noir anglo-saxon, a imaginé l’histoire terrifiant­e d’une adolescent­e africaine de 14 ans tenue en esclavage dans le sous-sol d’une maison londonienn­e.

La famille Songoli, émigrée d’un pays d’Afrique, est en apparence une famille bourgeoise sans histoire. Mais elle cache un secret : une orpheline africaine de 14 ans, Muna, vit recluse à la cave, sans que personne se doute de son existence, et elle sert d’esclave à la famille.

Un jour, le cadet des fils Songoli ne rentre pas de l’école. Scotland Yard ouvre une enquête sur la disparitio­n et inspecte la maison. Le couple Songoli n’a plus le choix : Muna doit maintenant être traitée comme si elle était leur fille. Mais ils n’avaient pas pressenti que leur esclave était très brillante et organisera­it sa vengeance.

UN GENRE NOUVEAU POUR ELLE

Minette Walters est douée pour donner froid dans le dos à travers son roman. « C’était une commande de l’éditeur », explique Minette Walters, en entrevue depuis sa maison du comté du Dorset, en Angleterre. « Je n’avais jamais écrit d’histoire d’horreur, même si j’avais toujours voulu le faire. Je voulais savoir si j’allais y arriver. Je pouvais écrire l’histoire de mon choix. J’y ai pensé. Puis je me suis dit que l’esclavage moderne était d’actualité. »

« J’ai décidé d’écrire sur ce sujet, en me basant sur la tradition d’Edgar Allan Poe, de celliers et de caves, d’internemen­t, de la vie qui côtoie la mort. C’est sombre, n’est-ce pas ? J’adore l’idée d’aller explorer les limites. Et puis je me suis dit : qu’arriverait-il si je pouvais aller dans la tête de Muna ? Si je décrivais ce qui se passe de son point de vue à elle ? Je me disais que ce serait une véritable histoire d’horreur. Je pense que ça marche ! »

Et l’horreur, c’est justement que son histoire est plausible. Et que des cas semblables ont fait les manchettes. « J’ai fait une entrevue avec la BBC à Londres et la journalist­e avait des journaux sur son bureau. Avant de commencer l’entrevue, elle m’a dit : “Regardez ceci.” C’était assez extraordin­aire : il y avait un cas plutôt semblable à ce que je décris dans mon roman. C’était vraiment troublant. »

LES CONTRASTES

L’écrivaine devait se plonger totalement dans la psyché et dans la pensée de la jeune Muna pour écrire le roman. « Je suis vraiment inspirée par mes personnage­s. C’est un défi, et une joie d’écriture, vraiment, de trouver comment inviter les lecteurs dans la tête du personnage. Avec Muna, je ne me souviens pas comment je suis arrivée à me mettre à la place d’une fille de 14 ans enfermée dans un cellier, abusée sans arrêt. »

Sa voix lui est apparue facilement quand elle l’a opposée au personnage de Princesse. « Le contraste entre les deux est frappant : Muna est très brillante alors que Princesse ne l’est pas. Ce n’est qu’une méchante intimidatr­ice. Elle est vraiment désagréabl­e. On découvre leur personnali­té à travers leurs conversati­ons. »

SES PROPRES PEURS

Dans la réalité, il y a deux choses qui font vraiment peur à Minette Walters : la noirceur et les chevaux. « J’ai visité une mine de charbon. Ils ont fermé les lumières. Maintenant, je sais ce que c’est que la noirceur totale. J’ai aussi peur des chevaux. Ce n’est pas tant de les voir... mais de les chevaucher. Monter à cheval me terrifie. Quand j’avais 10 ans, ma mère nous a fait suivre des cours d’équitation et le poney a pris le mors aux dents. »

Minette Walters a été récompensé­e par de nombreux prix littéraire­s en Angleterre et aux États-Unis.

Le sang du renard (2004) a été lauréat du plus prestigieu­x prix de la littératur­e policière anglaise, le Gold Dagger Award.

Elle vit dans le Dorset.

Son prochain roman, The Last Hours, est une fiction historique.

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