Le Journal de Montreal - Weekend
SUR UN AIR D’ENNIO MORRICONE
Le compositeur de la musique du film Dans la brume, de Daniel Roby, actuellement en salle, a su très jeune qu’il voulait exercer ce métier.
Michel, quel est votre premier souvenir d’une salle de cinéma ?
J’étais vraiment jeune. Ma soeur aînée m’avait emmené voir, pour mon anniversaire, Un amour de coccinelle, au cinéma Roxy de Shawinigan. Ça m’a complètement marqué, parce que c’était aussi la première fois que je faisais un tour d’autobus. Le film a également marqué l’imaginaire de toute la famille, puisque nous avons eu quatre ou cinq Volkswagen Beetle par la suite !
Votre premier film marquant ?
J’ai été fan de science-fiction très jeune. Mon premier film marquant est le tout premier La planète des singes, sorti en 1968. Nous venions de déménager en banlieue de Montréal, je venais d’avoir 11 ans et les voisins m’ont emmené au ciné-parc de Boucherville pour le voir. La scène des singes qui arrivent à cheval sur la musique de Jerry Goldsmith m’a complètement chaviré. […]
J’ai su que je voulais être compositeur de musiques de film en voyant Le bon,
la brute et le truand. J’étais tout de suite allé m’acheter la trame sonore d’Ennio Morricone. On parle ici de deux compositeurs aux antipodes l’un de l’autre ; Goldsmith était très expérimental, et Morricone, très mélodieux. Ils utilisaient, dans les deux cas, des timbres, des mixes d’instruments. Ils étaient tous deux très avant-gardistes. Dans le cas de Le bon, la brute et le truand, il y a de la guitare électrique, de la bombarde, du banjo, de l’harmonica, un orchestre et un mec qui siffle derrière… Ça m’a renversé. Goldsmith, pour La planète
des singes, a fait des percussions sur des noix de coco, des bouts de bois, il a vraiment expérimenté pour donner une texture à cette tribu des singes. Ce sont, dans les deux cas, des couleurs musicales.
Et plus récemment ?
J’aime beaucoup les films d’Alfonso Cuaron. Les fils de l’homme m’a beaucoup marqué. J’ai toujours aimé ces films de science-fiction britannique un peu gris, à la fois très fictifs et très réalistes. J’ai beaucoup aimé Whiplash, de Damien Chazelle, qui est complètement ailleurs et qui, pour moi, est une tragédie grecque.
Selon vous, la meilleure trame sonore de toute l’histoire du cinéma ?
Je vais en citer plusieurs. En haut de la liste, celle de Le bon, la brute et le
truand. Elle est tellement forte que, pour moi, on en oublie presque l’histoire. Évidemment, celle du Parrain qui est, pour moi, l’un des plus grands films. J’ai aussi un faible pour le premier Blade Runner, avec la musique de Vangelis.
Votre premier « kick » au grand écran ?
Catherine Deneuve. Je regardais les films de Radio-Canada très tard le soir en cachette quand j’étais adolescent. Je devais avoir 12 ans, et je suis tombé sur Répulsion, de Roman Polanski. La scène dans laquelle les bras sortent des murs m’a complètement marqué ! Et j’ai trouvé Catherine Deneuve très belle, très fragile.
La trame sonore qui a bercé votre adolescence ?
Il y en a plusieurs. Celle de L’exorciste, de Mike Oldfield, que j’ai adoré et que j’ai écoutée en boucle en étudiant. Celles des films de Sergio Leone. D’un autre côté, j’ai beaucoup aimé celle de Rencontres du troisième type, de John Williams. J’achetais déjà énormément de trames sonores à cette époque-là. Et j’aimais aussi les pièces de Vladimir Cosma pour les comédies de Francis Veber.
Le classique que vous n’avez jamais vu ?
L’auberge espagnole. Ma blonde me le reproche encore !
Le film dans lequel vous aimeriez vivre ?
Ma première réponse était OSS 117, pour la musique et le personnage ! Aussi, Pour l’amour d’Hollywood, pour ce monde du jazz où tout est beau.