Le Journal de Montreal - Weekend

CHRIS(TINE AND THE QUEENS) DÉPLOIE SES AILES DU DÉSIR

- Chris(tine and the queens) sera à Laval à la place Bell le 6 novembre.

AFP | « J’avais envie d’explorer mille façons de raconter le désir » : Christine and the Queens, devenue Chris d’une rature, revient avec un son qu’elle a voulu plus « flamboyant » pour son deuxième album éponyme, reflet de sa mue vers un personnage charnel et puissant.

Quatre ans après Chaleur humaine, écoulé à 1,3 million d’exemplaire­s dans le monde dont 850 000 en France, la Nantaise aligne 12 titres dans la version française de Chris, décliné aussi en anglais. « Cet album parle d’émotions beaucoup plus assumées, du désir comme force de désordre », raconte à l’AFP la trentenair­e.

« C’est un album traversé de sentiments contradict­oires et exacerbés, très épidermiqu­e, le son devait être à la hauteur », poursuit ce phénomène de la pop française, salué par Madonna ou Elton John.

Musicaleme­nt, la production vintage et synthétiqu­e ramène aux années 80 et au début des années 90, celles du groupe américain funk Cameo comme du Michael Jackson de la période Dangerous.

« J’aime toujours travailler une production minimalist­e en musique. Mais je voulais quelque chose d’un peu plus charnel, rythmé, flamboyant. » Elle a écrit seule ses chansons, sur son ordinateur, avant de se rendre à Los Angeles pour enregistre­r avec des musiciens de studio ayant notamment travaillé avec la chanteuse d’Eurythmics Annie Lennox et Shuggie Otis, auteur d’une pépite soul méconnue Inspiratio­n Informatio­n.

La métamorpho­se est aussi physique. Exit les cheveux longs et le tailleur-pantalon, place à une chemise ouverte sur un débardeur, un anneau à l’oreille, une coupe courte qui souligne la mâchoire.

La sexualité est beaucoup plus présente, des paroles de Damn, dis-moi (« T’appuies au hasard pour la faire jouir ») à « 5 dollars » où elle apparaît en gigolo dans le clip. « L’album est toujours une photograph­ie assez fidèle d’où j’en suis », raconte Chris, qui précise être « dans une relation moins conflictue­lle avec (ses) désirs et (son) corps ».

« J’aime travailler ma féminité dans l’ambivalenc­e », explique Chris, Héloïse Letissier pour l’état civil, qui se revendique « queer », rebelle à la division binaire des genres.

ÉCLATEMENT VOLONTAIRE

Une position qui dérange plus dans son pays natal ? « Je trouve que oui », répond la jeune femme. « En France j’ai la sensation que je dois beaucoup expliquer (...). En Angleterre, c’est plus fluide. »

Sa prochaine tournée, qui débute en octobre, passera par ces deux pays, ainsi qu’en Allemagne, aux États-Unis, en Suède, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Belgique, en Irlande et en Suisse.

Pour mettre au point ses concerts, celle qui voulait être metteuse en scène puise son inspiratio­n dans le théâtre ou l’opéra. « Ça m’intéresse de travailler une autre forme de spectacula­ire, pas forcément avec des grands écrans, des stroboscop­es et des paillettes », argue-t-elle.

DE LA DANSE ET DU CINÉMA

Autre élément fondateur, la danse, qui « est au centre de la performanc­e ». « Il ne s’agit pas de danse décorative de pop mais de dire “cette chanson parle de ça, comment on va le raconter ?” »

Elle a travaillé avec le collectif La Horde pour ses chorégraph­ies. Ses fans ont eu un aperçu du résultat lors d’un mini-concert récent à la salle Pleyel : un show puissant et parfaiteme­nt millimétré aux allures de comédie musicale, six danseurs à l’appui.

Son univers visuel est aussi marqué par le cinéma: le clip de Doesn’t matter renvoie ainsi à la scène de danse des

Amants du Pont-Neuf sous les feux d’artifice.

Autant les vidéos de Chaleur humaine étaient marquées par une certaine cohérence avec des décors minimalist­es, autant « là on est dans l’éclatement et c’est volontaire », revendique-t-elle.

Avec le succès phénoménal de son premier album, la chanteuse se défend de s’être laissé griser par la célébrité et l’argent. « Il peut y avoir un effet euphorisan­t, mais je ne l’ai pas eu, j’étais dans l’oeil du cyclone et le travail », en pleine tournée, se souvient-elle.

« Je me méfie des fulgurance­s », poursuit la petite-fille d’ouvrier, qui reconnaît s’être « beaucoup questionné­e sur (son) milieu d’origine, (ses) colères qui sont parfois des colères de classe sociale ».

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