Le Journal de Montreal - Weekend

UN CONDENSÉ UTILE DES ANNÉES DE JEAN CHAREST

Le gouverneme­nt Charest a été un des plus corrompus de l’histoire du Québec, nous dit d’emblée l’ex-journalist­e et biographe de René Lévesque, Pierre Godin. Il sera aussi le plus critiqué, en raison des « effluves nauséabond­s de corruption » qui s’en déga

- JACQUES LANCTÔT

Mais peut-être que cette odeur, provenant « du douteux trafic des enveloppes brunes, des caisses électorale­s occultes […] du népotisme politico-financier et de la partisaner­ie », n’avait-elle pas encore effleuré le 8 décembre 2008, alors que Jean Charest assume son troisième mandat ? C’est pendant cette période que le premier ministre devra se résigner à créer, à l’automne 2011, la commission d’enquête présidée par la juge France Charbonnea­u sur la corruption entourant l’octroi de contrats publics et le financemen­t des partis politiques. TRAIN DE VIE

Combien vaut Jean Charest, se demanderon­t enquêteurs et journalist­es, sans pourtant obtenir de réponse. Rien ne transpire sur sa prime de 75 000 dollars ni sur sa luxueuse propriété à North Hatley, mais son train de vie princier ne cesse de susciter de nombreuses questions.

C’est sous Jean Charest que débutera le démantèlem­ent du modèle québécois « jugé

trop onéreux par les riches » et qui se poursuivra sous le régime de Philippe Couillard. Il met de l’avant d’importants projets de partenaria­t public-privé.

Censée rapporter des économies au gouverneme­nt, la constructi­on du CHUM en mode PPP coûtera plus de 3,6 milliards de dollars, soit deux fois plus que prévu au départ. Les ouvriers francophon­es « sont forcés de jaspiner en anglais avec les contremaît­res anglophone­s unilingues imposés par les consortium­s étrangers choisis par le gouverneme­nt Charest ». On se croirait revenu aux années cinquante et soixante où il fallait « speak white » pour se trouver un travail décent.

Si on ne leur envoie pas de documents rédigés en anglais, on est barré, affirme un fournisseu­r local. Même gaspillage éhonté avec les contrats d’entretien confiés au privé. On se doute bien que ces lucratifs contrats ont été octroyés à des sous-traitants privés qui cotisent généreusem­ent à la caisse du Parti libéral.

ENCORE DES SCANDALES

D’autres scandales émailleron­t la gouverne « les deux mains sur le volant » du gouverneme­nt Charest, comme celui entourant la constructi­on du premier CHSLD réalisé en PPP à Saint-Lambert avec le Groupe Savoie. « L’hôpital coûtera 60 millions de dollars de plus pour moins de services. » La famille au grand complet d’Eddy Savoie, PDG du Groupe Savoie qui gère le CHSLD de Saint-Lambert, a donné plus de 58 600 dollars au Parti libéral entre 2000 et 2009 », année où le groupe décroche le contrat de 200 millions de dollars pour construire et gérer le nouvel hôpital, raconte l’auteur. Un musée aux horreurs, affirme un employé : salaires de 12 dollars de l’heure contre 18 dollars au public, employés inexpérime­ntés, pas de changement de couches la nuit, pénurie de médecins, etc.

Godin rappelle, en passant, l’histoire entourant le salaire et autre émolument versé au PDG de la Banque Nationale, Louis Vachon. En 2011, il touchait 8,5 millions de dollars, alors que la banque estime, malgré tout, que son patron est sous-payé. Il tenait même ses conseils de direction en anglais.

La liste des horreurs se poursuit pendant près de trois cents pages. Si cet ouvrage ne nous apprend rien de nouveau, il a le grand mérite de nous rappeler l’impunité dont jouit toujours monsieur Teflon, l’ex-premier ministre Charest, et que l’UPAC poursuit ses enquêtes sur le financemen­t illégal au Parti libéral.

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Pierre Godin Éditions Leméac CORRUPTION, COLLUSION, ABSOLUTION

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