Le Journal de Montreal - Weekend

DES FEMMES AUTOCHTONE­S SI BIEN VENGÉES...

- JOSÉE BOILEAU Collaborat­ion spéciale

Le titre l’annonce : on meurt beaucoup dans Neiges rouges, le dernier roman de François Lévesque. Mais quel drame social sous les cadavres !

Neiges rouges s’ouvre sur une poursuite à pied dans la neige profonde. On est au nord du Québec, aux côtés de Vincent Parent, policier déjà croisé dans un précédent roman de François Lévesque, à courir derrière un duo de femmes autochtone­s. La mère et sa fille de 14 ans sont soupçonnée­s de trafic de stupéfiant­s.

Soudain, le partenaire de Parent sort son arme, tire, tue la mère puis tourne le revolver vers son collègue. Parent réagit et, plus rapide, l’abat. L’ado en profite pour s’enfuir pour de bon.

Que s’est-il passé ? Pourquoi Antoine Lemay, policier d’expérience à la Sûreté du Québec, a-t-il abattu de sang-froid une femme qui ne le menaçait pas et pourquoi allait-il en faire autant avec son partenaire ? D’autant qu’il n’y avait là rien de spontané, puisque Lemay s’est servi d’une autre arme que son Glock de service.

Victime dans cette affaire, Vincent Parent ne peut se mêler de l’enquête. Reste qu’il aimerait bien la tirer au clair, surtout quand il apprend que Lemay aurait un complice au sein de la police. Il aimerait encore plus retrouver Kanti, l’adolescent­e disparue… et qu’il n’est pas seul à chercher.

L’an dernier, François Lévesque nous offrait un roman d’atmosphère – d’envoûtemen­t avais-je écrit à propos de En ces bois profonds. Avec Neiges rouges, son dixième ouvrage, il revient au roman policier classique, où l’efficacité l’emporte sur la psychologi­e des personnage­s. C’est un autre genre, moins prenant.

Mais les forces de Lévesque restent les mêmes. D’abord l’art de planter le décor. Comme souvent chez lui, on est loin en région, dans un coin de petite ville et de villages isolés autour. Pays de bois, de chasse et de vastes étendues désertes, où tout le monde se connaît. François Lévesque vient de l’Abitibi et il sait parfaiteme­nt décrire cet univers.

Il sait aussi se saisir des sujets qui font l’actualité, sans s’appesantir, mais en l’insérant à l’action. Ce qui se joue dans

Neiges rouges, c’est le sort des femmes autochtone­s si souvent méprisées et confrontée­s au pouvoir policier blanc, ou plutôt à ses pommes pourries… qui ne sont pas si faciles à identifier. Même Vincent Parent n’aura rien vu venir.

Ce Vincent Parent est d’ailleurs un autre atout de François Lévesque. Il a su créer un policier ordinaire, très loin du cliché du détective asocial, alcoolique, bourru, aux obsessions géniales ou secrètes… Certes, Parent est gai, mais comme on l’est aujourd’hui : il n’y a plus grand monde pour en faire tout un plat.

Son meilleur ami est d’ailleurs hétéro. Rencontré dans le roman Une maison de fumée, Dominic Chartier, policier de Montréal, viendra assister Vincent dans son enquête non officielle.

Ça finira durement, dans le sang, et pourtant bien. Car, autre caractéris­tique de Vincent, c’est un homme bon. Ça vaut parfois la meilleure des justices.

 ??  ?? NEIGES ROUGES François Lévesque Alire 271 pages
NEIGES ROUGES François Lévesque Alire 271 pages
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada