Le Journal de Montreal - Weekend
Le Département V reprend du service
Ceux qui ont dévoré tous les romans de l’écrivain danois Jussi Adler-Olsen attendaient ce livre depuis longtemps. En partie parce qu’il lève enfin le voile sur le mystérieux passé d’Assad.
Oh, qu’on avait hâte de le lire, ce huitième opus de la série du Département V ! Car depuis Miséricorde ,le tout premier volet paru en français en 2011, on a toujours suivi avec beaucoup d’intérêt les enquêtes de cette unité d’investigation essentiellement affectée aux affaires non résolues.
Au fil des ans, on s’est ainsi peu à peu attaché à l’indolent inspecteur Carl Mørck. Et plus encore à ses trois assistants, la bouillonnante Rose, le timide Gordon et le très mystérieux Assad. Très mystérieux parce qu’en gros, on ne sait pratiquement rien de ce réfugié syrien à la fois dévoué et fort comme un Turc. Pour vous dire, même Carl n’a pas la moindre idée de l’endroit où il peut bien dormir chaque nuit ! En revanche, il n’est pas difficile de deviner qu’Assad a eu un pénible passé chargé de lourds secrets… qui seront ici enfin dévoilés !
Vous vous rappelez sûrement que
Selfies, le septième opus de la série, nous permettait enfin de comprendre pourquoi Rose pouvait parfois se comporter de façon particulièrement bizarre. Eh bien, c’est maintenant au tour d’Assad ! Pas de se comporter de façon bizarre, mais de se retrouver sous le feu des projecteurs. Parce qu’avec Victime 2117, on apprendra tout, tout, tout sur lui.
« J’ai fait le synopsis de cette série en 2005 et depuis le début, je savais que le tome huit serait consacré à Assad, explique Jussi Adler-Olsen, qu’on a pu joindre chez lui, au Danemark. Mais à ce moment-là, la guerre en Syrie n’avait pas encore éclaté et pendant que j’écrivais les tomes cinq, six et sept, la situation n’arrêtait pas de changer au Moyen-Orient. Ça a donc été un énorme casse-tête pour moi de faire en sorte que tout ce que j’avais déjà mentionné sur Assad dans les précédents volumes puisse ici se compléter et se rejoindre ! »
LE LEVER DU RIDEAU
En 2005, il n’y avait pas non plus autant de problèmes d’immigration qu’aujourd’hui. Une triste réalité que Jussi Adler-Olsen n’a pas hésité à glisser dans ce livre. « Je suis quelqu’un de très politisé et de très critique par rapport à ce qui se passe dans la société, et dénoncer ce qui me choque est important pour moi, précise-t-il. Mais je ne peux rien changer, juste mettre un doigt sur la plaie. Ensuite, aux lecteurs de se forger leur propre opinion, de décider si telle ou telle chose est bien ou mal. »
PLUS QU’UN NUMÉRO
Alors, direction Ayia Napa, une station balnéaire touristique du sud-est de Chypre, où une trentaine de cadavres se sont échoués sur la plage. Dont celui d’une femme de 70 ans originaire de Syrie. Tout comme 2116 autres migrants avant elle cette année, elle a péri en tentant de traverser la Méditerranée. Ce qui la rendra célèbre du jour au lendemain, un journaliste espagnol ayant décidé de faire quelques reportages sur cette victime 2117. Mais pour Assad, elle sera beaucoup plus qu’un numéro. Car dès qu’il verra sa photo à la une des journaux, il comprendra qu’une véritable course contre la montre vient de s’engager. Et qu’il aura bientôt besoin de l’aide de ses collègues du Département V pour affronter les nombreux fantômes de son passé.
Encore fragile et sous antidépresseurs, Rose ne pourra cependant pas se joindre à la folle équipée qui ne tardera pas à suivre. « En parallèle, j’ai donc eu besoin d’une autre histoire, d’un problème qui la tiendrait occupée aux côtés de Gordon, s’exclame Jussi Adler-Olsen. Et ce problème a été Alexander. Avant, quand les jeunes n’allaient pas, il arrivait qu’ils se suicident. Maintenant, plusieurs d’entre eux s’isolent de la société en restant enfermés dans leur chambre avec leur ordinateur. Au Japon, où ils sont appelés Hikikomori, ils seraient près d’un million et leurs parents en ont honte. »
Ledit Alexandre, qui n’a pas quitté sa chambre depuis des semaines pour enchaîner les parties de Kill Sublime, menace en effet de tuer sous peu un paquet de monde. À commencer par ses parents, qu’il déteste. Mais de notre côté, on a adoré. Aussi bien cette histoire que celle d’Assad parce qu’en s’imbriquant, elles nous permettent de savourer l’un des meilleurs romans de Jussi Adler-Olsen.