Le Journal de Montreal - Weekend

R. J. ELLORY REVISITE L’HISTOIRE

Fasciné par le clan Kennedy, l’écrivain britanniqu­e R. J. Ellory a eu l’idée de voir ce qui aurait pu se passer si John F. avait vécu un peu plus longtemps.

- KARINE VILDER Collaborat­ion spéciale

Ce n’est pas la première fois qu’un auteur revisite l’Histoire en imaginant ce qui se serait passé si… Si les conquistad­ors espagnols n’avaient jamais débarqué en Amérique (Civilizati­ons de Laurent Binet), si Hitler avait été accepté à l’École des beaux-arts de Vienne (La part de l’autre d’Éric-Emmanuel Schmitt), si les nazis avaient remporté la Seconde Guerre mondiale (Fatherland de Robert Harris) ou si, tel que le raconte R. J. Ellory dans Le jour où Kennedy n’est pas mort, John Fitzgerald Kennedy n’avait pas été assassiné à Dallas le 22 novembre 1963.

« Il y a quelque temps, au cours d’une réunion, mon éditeur m’a dit : “Tu as écrit sur la CIA, le FBI, le KKK, la police de New York, la pègre… Est-ce qu’il y a un sujet politique historique que tu n’as pas encore couvert et dont tu aimerais parler ?” J’ai répondu oui, la présidence de JFK. Mais comme beaucoup, beaucoup de livres ont déjà été écrits sur cet homme d’État, mon éditeur a pensé que le mieux serait de privilégie­r un angle différent, de trouver un point de vue qui n’a pas été exploité. »

Et ce point de vue, il n’a pas tardé à lui sauter aux yeux. « Une fois mort, JFK est devenu une véritable icône, poursuit R. J. Ellory, qu’on a pu joindre au téléphone chez lui, à Birmingham. Mais s’il n’avait pas été assassiné, est-ce qu’il aurait réellement réussi à convaincre la population américaine de le placer à la tête du pays une seconde fois ? »

UN DIRIGEANT TROUBLÉ

Comme chacun le sait aujourd’hui, John F. Kennedy a trompé sa femme Jackie à d’innombrabl­es reprises. Un aspect de sa vie encore moins reluisant ? Son état de santé, qui n’était vraiment pas génial-génial : en plus de ses douleurs chroniques au dos, Kennedy avait de sérieux problèmes d’intestin et de prostate, souffrait d’ostéoporos­e dégénérati­ve et était atteint de la maladie d’Addison, une affection rare des glandes surrénales. Dans ses mauvais jours, il lui arrivait ainsi de gober en même temps plus d’une dizaine de pilules différente­s… dont les effets secondaire­s devaient à leur tour être contrecarr­és par d’autres pilules.

« Pour un leader mondial, il était en assez mauvaise condition, ajoute R. J. Ellory. Et le fait de mélanger tous ces médicament­s (méthadone, codéïne, Librium, Demerol, etc.) n’a certaineme­nt pas aidé. Les médecins qui soignaient Kennedy s’obstinaien­t cependant à affirmer que ce dangereux cocktail médicament­eux n’affectait en rien ses facultés mentales et ses compétence­s de président. Mais dans les faits, JFK était quelqu’un d’imprévisib­le qui ne prenait pas toujours les bonnes décisions. Je pense même que c’était un individu très troublé. À partir de là, une question se pose : s’il n’avait pas été tué en 1963, jusqu’où son administra­tion aurait-elle été prête à aller pour dissimuler les preuves qui auraient à la fois pu le faire tomber en disgrâce et faire tomber le gouverneme­nt ? Je me suis dit qu’il n’y avait qu’une seule façon de le savoir : accorder à John F. Kennedy au moins une année de plus. »

REMPORTER UN DEUXIÈME MANDAT ?

Dans ce 13e roman de R. J. Ellory, les balles de Lee Harvey Oswald rateront donc de peu la tête du président. En juillet 1964, alors que la course électorale bat son plein, JFK multiplier­a ainsi les apparences publiques et les conquêtes féminines, histoire de soulager un peu la pression qu’il a sur les épaules (et ailleurs !). Un détail pratique que l’administra­tion Kennedy se garde bien de dévoiler aux journalist­es, ce type de frasques pouvant grandement contribuer à favoriser le candidat du Parti républicai­n.

C’est dans ce contexte politique instable que Mitch Newman, un photojourn­aliste à la pige travaillan­t à Washington, apprendra que Jean Boyd, la talentueus­e journalist­e qu’il a failli épouser une quinzaine d’années plus tôt, s’est suicidée aux somnifères. Et n’ayant pas grand-chose de mieux à faire, Mitch promettra à son ancienne belle-mère d’enquêter sur les derniers jours de son ex-fiancée. Un travail de détective qui l’amènera coûte que coûte à découvrir qu’au moment de sa mort, Jean s’intéressai­t de très près au clan Kennedy. De trop près, peut-être ?

Au final, un roman noir parfaiteme­nt maîtrisé qui nous permet surtout de découvrir la face longtemps cachée du mythe JFK.

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LE JOUR OÙ KENNEDY N’EST PAS MORT R. J. Ellory aux Éditions Sonatine 432 pages
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