Le Journal de Montreal - Weekend

INTRIGUE PALPITANTE DANS LES APPALACHES

- MARIE-FRANCE BORNAIS

David Joy, un des écrivains américains les plus talentueux de sa génération, raconte ce qui se passe quand un braconnier des montagnes des Appalaches se trompe de cible dans son nouveau roman, Ce lien entre nous.

Ce suspense inquiétant, se déroulant sur des terres à ginseng de la Caroline du Nord, offre à la fois une intrigue taillée au couteau, des personnage­s stupéfiant­s et une ambiance de cauchemar. Après avoir lu ce roman, personne n’aura envie d’aller fureter dans ces forêts giboyeuses, la nuit tombée !

David Joy en met plein la vue dans Ce lien entre nous .Le suspense se passe dans un coin reculé de la Caroline du Nord, où la beauté de la nature tranche avec le désespoir dans lequel est plongée la population. Darl Moody, un petit braconnier qui vit dans une maison mobile sur l’ancienne propriété de sa famille, tue accidentel­lement un homme.

Lorsqu’il réalise qu’il s’agit d’un membre du clan Brewer, connu dans cette région isolée des Appalaches pour sa cruauté et sa violence, il craint pour sa vie et celle de ses proches. Une seule personne peut l’aider : son meilleur ami, Calvin Hooper.

Mais Dwayne Brewer, parti à la recherche de son frère disparu dans les bois, ne met pas beaucoup de temps à remonter la piste jusqu’à Darl et Calvin. Et pour eux, le cauchemar commence. Et c’en est tout un.

UN MÉCHANT MÉMORABLE

David Joy, écrivain aussi jovial que ses personnage­s sont tordus, discute avec enthousias­me de la création de Ce lien entre nous, avec son accent chantant du Blue Ridge. « Je voulais créer un méchant vraiment mémorable », dit-il en entrevue.

Dans son roman, il fait allusion à trois personnage­s de malfrats qui l’ont marqué : The Misfit de Flannery O’Connor, dans A Good Man is Hard to Find, Lester Ballard dans Child of God, de Cormac McCarthy, et le personnage de Granville Sutter dans Twilight, de William Gay. Trois romans du sous-genre littéraire américain Southern Gothic.

« Ces trois personnage­s font des choses absolument horribles, mais ce sont des personnage­s complexes, et par moments, le lecteur ne peut pas faire autrement qu’être empathique à leur égard. C’est ce que j’avais en tête en construisa­nt le personnage de Dwayne Brewer. »

Personne n’aimerait croiser Dwayne. « Moi non plus ! », dit-il en riant de bon coeur. À un certain moment, dans le roman, l’aventure déraille. « Dwayne a son propre sens de la moralité – qu’on soit d’accord ou non avec son éthique personnell­e ! Il a ses croyances aussi et lorsqu’il comprend d’où il vient, c’est ce que j’aime le plus dans l’écriture, ça lui donne un peu d’humanité. »

Pour Dwayne, c’est oeil pour oeil,dentpourde­nt.«Ilyades moments dans le livre où il parle de Dieu, de religion, et dans son esprit, ce qu’il fait à Calvin, ou au garçon du Walmart, correspond à ce qu’il s’imagine que Dieu ferait. Il a un regard très pervers sur la foi, je crois. »

C’est le moins qu’on puisse dire. « Écrire des histoires heureuses, ça ne m’intéresse pas. Je veux écrire des histoires qui soulèvent des questionne­ments. »

LA NATURE

David Joy est profondéme­nt attaché au terroir des Appalaches. « Je m’intéresse beaucoup aux écrivains naturalist­es comme Edward Abbey, à l’écrivain pêcheur John Gierach, très populaire en France. Je passe tellement de temps dans les bois ! Je vis dans la forêt et le paysage est au coeur de ma vie. »

« Bien des écrivains passent beaucoup de temps à créer des décors. J’ai beaucoup de chance parce que l’endroit que je décris existe vraiment. J’ai marché chaque pouce de ce comté. Et quand j’écris, je sais parfaiteme­nt où se trouve chaque personnage.

 ??  ?? CE LIEN ENTRE NOUS David Joy. Éditions Sonatine, 301 pages.
CE LIEN ENTRE NOUS David Joy. Éditions Sonatine, 301 pages.
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada