Le Journal de Montreal - Weekend

LA BONNE RECETTE !

L’écrivain public, celui créé par Michel Duchesne et qui a pris les traits d’Emmanuel Schwartz à la télévision, est de retour ! Cette fois, Mathieu sévit dans une cuisine collective ; de quoi se régaler !

- JOSÉE BOILEAU Collaborat­ion spéciale

Michel Duchesne a à nouveau les deux pieds sur le plancher des vaches. Là où on ne s’embarrasse pas des apparences, où la misère n’est pas synonyme de tristesse, où le plaisir n’empêche pas les prises de conscience.

Bref, on s’amuse ferme dans son nouveau roman L’écho des chaudrons, même si on ne perd jamais de vue les écueils traversés par ses personnage­s.

D’ailleurs, l’un d’eux a vraiment existé : André Montmorenc­y, inoubliabl­e au théâtre comme dans les rôles de Friponneau et de Christian Lalancette à la télévision.

Dans le roman, on le décrit plutôt comme la vedette d’un téléroman inventé par Duchesne. Autre invention : le récit couvre l’année 2019, alors que Montmorenc­y est décédé en 2016.

Dans ce mélange de vérité et de fiction, l’ancienne vedette joue toutefois un rôle pivot car il est impliqué aux Fourchette­s d’Or, cuisine collective d’Hochelaga-Maisonneuv­e à Montréal. Et il y met souvent la pagaille !

Il faut dire qu’il ne va pas bien du tout, mais son déclin personnel et profession­nel et sa pauvreté ne l’empêchent pas de continuer de créer. D’ailleurs, ce sont les véritables dessins de Montmorenc­y qui illustrent le récit, l’auteur honorant ainsi une ancienne promesse faite à son ami.

Mais le personnage principal reste le sympathiqu­e Mathieu. Qui doit trouver du boulot : ce sera aux Fourchette­s d’Or pour quelques mois.

L’auteur contribuan­t lui-même à la cuisine collective du quartier, il avait l’inspiratio­n sous la main. Et il a si bien travaillé sa matière qu’on se prend d’affection pour ces « invisibles qui devons pas chialer », comme le présente la cheffe Valérie.

Mieux encore, Duchesne parsème son récit de moments de pur bonheur : une excursion à la campagne pour des gens jamais sortis de la ville ou une veillée sur le toit pour des handicapés qui le croyaient inaccessib­le.

Mathieu a aussi une fille, adolescent­e insolente pourtant attachée à son père. Quant à Solange, sa banlieusar­de de mère, elle multiplie les tensions avec son fils, mais jamais ne coupe le fil.

UN ROMAN REMPLI DE SAVEURS

On y verra une version moderne du monde de Michel Tremblay, mais Duchesne a son propre ton, fait d’autodérisi­on et d’affection, et une vision sociale assumée.

Alors ça déborde de répliques assassines et de remarques crues, d’incidents cocasses et d’observatio­ns implacable­s. Le titre même du roman, L’écho des chaudrons, renvoie aux grondement­s du Printemps étudiant de 2012.

Mais en attendant de changer le monde, les cuisines collective­s, comme bien d’autres organismes communauta­ires, veillent à rendre d’indispensa­bles services en dépit de leurs faibles moyens. Ça marche à la débrouille et à la bonne volonté, ce que l’auteur démontre sans rien enrober.

Ça donne un roman plein de boucane et d’épices, « de la joie en conserve, du courage en sauce », et au final un parfum qui persiste.

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240 pages 2020
L’ÉCHO DES CHAUDRONS Michel Duchesne Leméac 240 pages 2020
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