Le Journal de Montreal - Weekend
Pandémie, réseaux sociaux et santé mentale, un cocktail explosif
La pandémie a entraîné des conséquences qui vont avoir des répercussions psychologiques importantes et durables. Justine Fortin et Marjolaine RivestBeauregard, deux étudiantes en psychologie et psychiatrie, ont créé le balado COVID 19 : sors de ma tête pour mieux comprendre les différents mécanismes psychologiques liés à un événement traumatique.
Les deux universitaires reconnaissent avoir elles-mêmes eu des réactions surprenantes à l’arrivée de la pandémie. « Au départ, j’étais plutôt dans le déni en me disant que ce n’était qu’une petite grippe, a expliqué Justine Fortin. Mon père est dans le domaine dans la santé et avoir quelqu’un de proche qui travaille au front m’a rapidement ramenée à la réalité. Mais le comportement qui m’a le plus surpris, c’est la peur de ne pas avoir assez de nourriture. Les gens couraient pour aller à l’épicerie, et ça a créé un même comportement chez moi par imitation. »
Marjolaine Rivest-Beauregard s’est plutôt réfugiée dans le travail. « Ça peut être vu comme malsain, mais je dirais que ça a aussi apporté un facteur protecteur de résilience. Ça m’a vraiment permis d’essayer de comprendre ce qu’était la COVID et cette pandémie, avec l’idée d’essayer de faire quelque chose pour aider. »
L’INFLUENCE DES MÉDIAS SOCIAUX
Dans le balado, les deux universitaires se concentrent principalement sur les réactions de leur tranche d’âge, soit les 18-30 ans, et donc sur l’influence des médias sociaux.
« Beaucoup d’études expliquent que le fait d’être exposé de manière répétée à des informations sensationnalistes peut exacerber des symptômes, avance Marjolaine Rivest-Beauregard. Les réseaux sociaux ont certainement induit une augmentation des symptômes existants, notamment pour des gens qui étaient anxieux ou stressés. »
Cependant, ils ne seraient pas la cause des problèmes, même s’ils y contribuent. « Les médias sociaux numériques sont très diversifiés, ajoute Alexandre Coutant, professeur au département de communication sociale et publique de l’UQAM. Ce qui est clair, c’est qu’ils sont désormais partout dans notre quotidien et qu’ils nous accompagnent dans notre vécu. Selon les espaces qu’on visite, on va se retrouver avec des choses qui vont encourager du mal-être, du bien-être, ou les deux. Par exemple, au moment du premier confinement, il y a eu énormément de solidarité sur Facebook, et en même temps, beaucoup de choses qui pouvaient rajouter à l’angoisse et à l’incompréhension. »
En raison du confinement, les cellulaires ont surtout permis aux jeunes de rester connectés avec leurs amis, leurs proches et leur famille, mais aussi de rester informés. « C’est prouvé que plus on regarde des nouvelles positives, mieux on va se sentir, explique Justine Fortin. Les médias sociaux n’ont pas nécessairement déclenché des troubles de santé mentale, mais ils ont certainement augmenté la symptomatologie. »
ET MAINTENANT ?
Comme pour tout événement traumatique, il y a des choses à apprendre de ce qu’on vient de vivre. « Il faut accepter ce qui s’est passé, continuer à aller de l’avant, tout en cherchant des opportunités de croissance, détaille Marjolaine Rivest-Beauregard. Mais il ne faut pas laisser la pandémie derrière, comme s’il ne s’était rien passé. »
Un des éléments importants est que, si on a tous a vécu la pandémie en même temps, « tout le monde n’est pas rendu à la même étape dans l’après. Il faut respecter le rythme de chacun. Il faut continuer à avancer tout en se redéfinissant comme personne et comme collectivité. »