Le Journal de Montreal - Weekend
PARABOLE MAGISTRALE SUR LA PUISSANCE DE LA NATURE
Écrivain magistral, maintes fois récompensé, Franck Bouysse a imaginé une parabole sur la puissance de la nature et la quête de liberté dans son nouveau roman, Buveurs de vent. Campée dans une vallée du Gour Noir, région isolée du Massif central, l’histoi
Avec une plume hypnotique, extrêmement forte, Franck Bouysse a imaginé le sort de quatre frères et soeurs nés dans le Gour Noir, une vallée coupée du monde. Aucun d’eux n’apprécie l’injustice ni la destruction de la nature et ils travaillent tous, comme leur père, leur grand-père, et la communauté entière, pour Joyce, le propriétaire de la centrale, des carrières et du barrage. Joyce, le tyran, qui terrorise et manipule tout le monde. Joyce, que les gens comparent à un animal à sang froid. Joyce qu’on aimerait voir disparaître. Et un jour, une explosion secoue la vallée…
Le mystérieux Gour Noir que l’auteur évoque dans ce roman où surviennent plusieurs drames, c’est chez lui. « Tout part de ce Gour Noir, où il y a ce viaduc », dit-il, en entrevue depuis sa maison de campagne.
« Après, j’ai pris quelques libertés avec ce lieu, pour développer un côté un peu mythologique. Le roman a pris naissance dans cet endroit où je suis retourné, il n’y a pas très longtemps, pêcher avec mon fils. Il s’est passé un truc, une émotion de l’enfance : mon père m’y amenait il y a 40 ans. »
VOLET SOCIAL
C’est la première fois qu’il aborde un volet social en décrivant une révolte qui gronde dans la région. Il dépeint la tyrannie de Joyce, le constructeur de barrages, et sa volonté de soumettre et d’exploiter tout le monde. La tyrannie de ses sbires. Mais aussi une société assez fermée, centrée sur le « faire ».
« Ce qui m’a guidé dans la création de ce personnage, ce sont ces grands romans américains de l’entre-deux-guerres, où il y a souvent le type qui arrive de nulle part, qui veut fonder quelque chose et qui échoue, finalement. » Ainsi en est-il de Joyce, un archétype à la Faulkner, à la Steinbeck, à la Thomas Wolfe, note-t-il. « Ce que j’ai fini par montrer, c’est ce qu’il a toujours refoulé : la fondation de la famille. »
DES GENS TAISEUX
L’écrivain explique qu’il a côtoyé des gens fermés, distants, qui n’avaient pas le sens de la famille, comme Martin, le père des quatre jeunes. « Il y a des gens qui sont incapables de dire les choses. Je viens d’un milieu rural. Ici, on parle de gens taiseux, où il n’y a aucune transmission des émotions, de l’amour. La seule valeur d’ajustement, dans ce milieu, c’est le travail. »
Souvent, ajoute-t-il, on trouve des réponses dans la poésie que ces gens-là ont dans leurs gestes. « Ils ne savent pas transmettre les émotions, hormis par les gestes. Il faut juste savoir les observer. »
√ Franck Bouysse est né en 1965 à Brive-la-Gaillarde.
√ Il a publié une quinzaine de romans, dont Grossir le ciel et
Né d’aucune femme (Prix des Libraires 2019, Prix Babelio 2019, Grand Prix des lectrices de Elle 2019).
√ Buveurs de vent s’est hissé au premier rang du palmarès des Libraires – Livre Hebdo, en France.