Le Journal de Montreal - Weekend
FÉMINISME ET MASCULINITÉ TOXIQUE
Dans son nouveau film, l’actrice, scénariste et réalisatrice pousse sa réflexion sur la maternité et l’amour maternel tout en abordant le sujet de la masculinité toxique. En entrevue, Julie Delpy approfondit sa vision et parle aussi des modes et du succès.
« Je crois que c’est plus facile [aujourd’hui] pour certaines femmes [à Hollywood]. Moi, c’est plus difficile parce que mon approche est très personnelle. Je ne fais pas forcément ce qui est à la mode », dit Julie Delpy dès la première question d’une entrevue donnée de Los Angeles. « Je n’ai jamais été à la mode, même en tant qu’actrice. […] Je ne suis pas la personne “du moment”… ce qui n’est peut-être pas plus mal à la fin puisque la personne du moment ne dure, justement, qu’un moment. »
Dans son long métrage précédent, l’amusant Lolo, Julie Delpy se penchait sur la relation d’une mère avec son fils adulte, sorte de Tanguy profiteur. Ma Zoé, résolument dramatique, explore le cheminement d’une mère, Isabelle, qu’elle incarne et dont la fille, Zoé, va avoir un grave accident.
Parallèlement, Julie Delpy a également signé On The Verge, excellente série comique diffusée sur Netflix où elle donne la parole à des femmes de la génération X qui ont eu des enfants tardivement. Et, comme dans Ma Zoé, son personnage doit composer avec un homme à la masculinité toxique.
« C’est l’homme frustré, abusif et malheureux […], en fait, je pense que le machisme n’est pas quelque chose de joyeux. J’ai vu mon père être féministe et il était très heureux de pouvoir exprimer son insécurité, sa féminité, sa sensibilité tout en étant un homme. »
Joué par Richard Armitage, le personnage de James, l’ex d’Isabelle, « est dans le contrôle » et devient « un monstre ».
UN FILM PERTURBANT
De l’aveu de la cinéaste, James – et plusieurs des scènes avec Isabelle où domine la violence verbale – heurte les spectateurs, dérange.
« Un acteur qui pensait tenir le rôle a dit : “Je préfère jouer un tueur en série qui tue et viole des femmes que de jouer un homme abusif, mais réel.” C’est intéressant. Le personnage de James perturbe certains hommes alors que d’autres aiment que [ce type d’attitude] soit révélé. Ça perturbe aussi certaines femmes qui ne veulent pas entendre parler d’une femme qui prend de décisions aussi fortes. Elles ne veulent pas aimer cette Isabelle. »
« Ce qui dérange le plus les gens, c’est qu’Isabelle choisit sa propre souffrance, elle n’est pas victime. On a l’habitude de voir la femme être victime et les spectateurs adorent voir la femme en victime en ce moment, c’est vraiment à la mode. C’est une non-victime qui n’est pas, non plus, dans la violence. »
Et la cinéaste laisse le spectateur libre de ses émotions et de ses conclusions devant Ma Zoé. « Je n’ai pas utilisé de musique. Je ne dis pas quels sentiments doivent avoir les gens à certains moments. Et ça aussi, ça perturbe. »
Ma Zoé est présentement à l’affiche.