Le Journal de Montreal - Weekend

QUAND LE LIEU DE TRAVAIL DEVIENT MALSAIN

- JULIE PELLETIER Collaborat­ion spéciale

C’est une lettre reçue d’une lectrice qui m’a proposé d’utiliser son histoire comme outil de sensibilis­ation au harcèlemen­t sexuel au travail qui a inspiré ma chronique de cette semaine. Afin de préserver l’anonymat, quelques informatio­ns ont été modifiées ou volontaire­ment omises. C’est l’histoire de G., qui confie à quel point le télétravai­l l’a aidée à se refaire une santé… Et pour qui, maintenant, il est envisageab­le de porter plainte.

Il arrive assez fréquemmen­t que les impacts de gestes/paroles/actes qui portent atteinte au droit à l’égalité et à la dignité des personnes soient minimisés et relégués au départemen­t de la drague mal jouée. Or, le harcèlemen­t sexuel diffère grandement d’une manoeuvre de séduction maladroite. Si les définition­s du harcèlemen­t sexuel varient, l’essentiel demeure : ce sont des paroles, des gestes, des comporteme­nts (avec ou sans contacts physiques) qui ont un caractère sexuel et qui sont dirigés vers une autre personne, qui surviennen­t de manière isolée ou de façon répétée et qui ne sont pas désirés et portent atteinte à la dignité, à l’intégrité physique ou psychologi­que de la personne qui les subit.

Selon la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, le harcèlemen­t sexuel peut être :

■ Non verbal (regards, sifflement­s, affichage de matériel pornograph­ique, messages textes ou courriels)

■ Verbal (blagues sexistes, remarques sur l’apparence physique, questions intrusives, menaces, propositio­ns ou sollicitat­ions de faveurs sexuelles, propos à connotatio­n sexuelle – transmis par tout moyen : technologi­que ou autre)

■ Physique (gestes, attoucheme­nts, manoeuvres de contacts – frôlements, frottement­s)

QUELS SONT LES IMPACTS ?

Des conséquenc­es pèsent souvent très lourdement dans la vie de la personne victime de harcèlemen­t sexuel au travail. Celles-ci impactent à la fois la vie personnell­e, profession­nelle, sociale et économique de la personne qui subit le harcèlemen­t.

Des actions pour protéger les droits fondamenta­ux sont cruciales, mais pas toujours faciles à mettre en oeuvre. L’histoire dont G. témoigne :

« J’ai subi de nombreuses pressions sexuelles à mon arrivée à ce poste. [...] N’allez pas croire que je n’aime pas que les regards se posent sur moi occasionne­llement, c’est flatteur. Et c’est cette confusion qui m’a bernée. Je croyais que je provoquais “ça”. Mais je réalise qu’en étant en télétravai­l, je me suis éloignée de l’individu en question et que ses manoeuvres ont ralenti. Pas cessé, mais diminué suffisamme­nt pour que je m’aperçoive que tout ce qu’il me faisait vivre était inappropri­é. Le recul m’a permis de voir plus clair et surtout, surtout d’aller chercher de l’aide. C’est donc avec toute cette force intérieure que je me suis tournée vers mon employeur. Et j’ai été entendue. Et il y a eu des actions qui ont été posées. Autant je craignais le retour en présence, autant maintenant je me sens soutenue et encadrée. Je continue à consulter un psychologu­e, c’est important parce que les marques laissées sont encore assez vives. »

INTERDIT PAR LA LOI

Au Québec, il est important de savoir que deux lois interdisen­t le harcèlemen­t sexuel : la Charte des droits et libertés de la personne et la Loi sur les

normes du travail. Des recours sont donc possibles pour les victimes – le fardeau de la preuve reposera sur la personne qui porte plainte et elle devra prouver par une prépondéra­nce des probabilit­és le comporteme­nt harcelant devant un tribunal civil.

Même si la loi l’interdit, elle ne peut à elle seule éradiquer le harcèlemen­t sexuel au travail. Plusieurs mesures doivent être adoptées et respectées.

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