Le Journal de Montreal - Weekend

LE LONG CHEMIN DE LA RÉPARATION

- MARIE-FRANCE BORNAIS

S’intéressan­t toujours de près aux enjeux et aux nombreux défis des relations hommes-femmes, Janette Bertrand propose cet automne la suite de son livre Un viol ordinaire. À travers ses personnage­s, elle raconte le long chemin de la réparation et le début d’une évolution dans les mentalités dans Un homme, tout simplement, son nouveau roman. Un livre émouvant, basé sur un long travail de recherche et beaucoup d’entrevues, qui apporte de la lumière sur une situation difficile.

Laurent, son « homme ordinaire », a été accusé d’agression sexuelle par Léa, son ex-amoureuse. Il est en attente des procédures judiciaire­s. Cette histoire a été racontée dans le détail dans Un viol ordinaire.

Depuis un an, l’eau a coulé sous les ponts et Laurent est en cheminemen­t personnel. Il a compris ses torts et souhaite devenir un homme meilleur, sans trop savoir comment s’y prendre. Il souhaite raccommode­r sa relation avec Léa, mais là aussi, ça n’est pas simple. Sa vie familiale est perturbée et il est dans tous ses états.

Sa rencontre avec Sébastien, un homme qui dirige un petit groupe de parole et d’écoute entre hommes, l’aidera à atteindre son but. Son cheminemen­t permettra à ses parents, Julie et Paul, de faire de grandes réflexions eux aussi.

Janette Bertrand s’est beaucoup investie dans la recherche et la rédaction de ce nouveau livre où les personnage­s vivent des émotions fortes, de profondes remises en question.

Ils naviguent tous dans la tempête et bénéficien­t de l’aide de bons capitaines et de bons phares...

LES GROUPES D’HOMMES

« Ce que j’ai voulu prouver, c’est que c’est au tour des hommes de faire quelque chose. C’est clair », dit-elle d’entrée de jeu, en entrevue. « Nous autres, on a changé. On est rendues là. Les hommes sont encore dans le patriarcat. Alors, il faut qu’ils en sortent, et la façon de faire, c’est les groupes d’hommes. »

Janette Bertrand en est venue à cette conclusion après avoir discuté longuement avec Michel Dorais, avec des hommes qui font partie de groupes de parole d’hommes. « J’ai eu accès à des groupes d’hommes. Je me suis rendu compte que ça marche ! Or, ils ne sont jamais subvention­nés, parce qu’on ne trouve pas ça important. Les hommes ne veulent pas aller chez les psys, mais entre gars, c’est correct. »

Une grande partie du roman est basée sur ces rencontres entre hommes, qui discutent, qui remettent les pendules à l’heure, qui sont à l’écoute, dans le respect, de ce que vivent les leurs. « Il y en a partout au Québec, des groupes d’hommes. »

SIX MOIS DE RECHERCHE

Janette Bertrand a consacré six mois à la recherche avant d’écrire son livre, où elle parle du concept de la justice réparatric­e – une façon de réparer les torts sans passer par le système judiciaire. « Je suis allée rencontrer des avocates, des travailleu­ses sociales, des femmes qui sont médiatrice­s, pour avoir les vrais mots. »

Cette grande communicat­rice s’intéresse depuis des décennies aux relations interperso­nnelles. Croit-elle que c’est possible de réconcilie­r le masculin et le féminin, dans notre société ? « Oui. Mais si les hommes ne font rien, il va y avoir des clivages entre les hommes et les femmes. Ils existent déjà. C’est aux hommes à faire des pas. »

Elle ajoute que, malheureus­ement, il y en a qui ne veulent pas changer. « Ils sont bien comme ils sont là. Il y a des avantages au patriarcat : c’est le gars qui a raison, tout le temps. Il peut faire ce qu’il veut. »

Une piste de solution ? « Il faut que ce soit plus égal entre les hommes et les femmes. Sinon, j’ai peur que les hommes et les femmes, on devienne des ennemis. Mais ce qui me donne espoir, c’est la paternité. C’est plus comme avant : les hommes s’occupent autant des enfants que la femme. »

■ Janette Bertrand est une figure emblématiq­ue du confinemen­t, présente sur toutes les tribunes.

■ Elle a mis sur pied le projet Écrire sa vie !, par lequel elle a enseigné aux personnes âgées à rédiger leur biographie, initiative qui a rencontré un succès fulgurant.

■ Janette Bertrand a beaucoup écrit dans sa vie : journalism­e, romans, essais, dramatique­s pour la télévision.

■ Son importance a maintes fois été soulignée par de prestigieu­x prix et de nombreuses distinctio­ns, dont le Prix Hommage Guy Corneau 2021 pour sa contributi­on au bien-être des hommes et la valorisati­on de la réalité masculine au sein de la société.

■ Elle a écrit une chanson pour Lynda Lemay, Parle-moi.

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UN HOMME, TOUT SIMPLEMENT Janette Bertrand Éditions Libre Expression, 192 pages
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