Se fier à la maturité des étudiants
une loi sur l’exercice de la démocratie dans les institutions du secteur de l’éducation s’impose.
La preuve en a été faite ces derniers jours dans les cégeps de la région de Québec.
Au cégep François-Xavier Garneau, le taux de participation au vote par internet sur la tenue d’une journée de grève hier pour se rendre participer à la manifestation à Montréal a été de 76,2 %. Le refus de joindre le mouvement de boycottage des cours a été le choix de 67 % des 4300 électeurs sur les quelque 5730 étudiants de l’institution.
Au cégep Sainte-Foy, le taux de participation fut de 77 % et le refus, de 65 %.
À deux autres cégeps de la région de Québec, les directions des associations étudiantes ne se sont même pas aventurées dans des votes de grève.
Plus la démocratie s’exprime largement, voire massivement, plus les partisans du boycottage des cours sont marginaux.
LIÉEs pAr LEs rÉsuLtAts
Une telle loi sur la démocratie dans le secteur de l’éducation devrait englober aussi le respect des décisions de la majorité par les directions des associations.
Lorsqu’un vote de grève à main levée est arraché en fin d’une interminable assemblée, avec un quorum minimaliste, dans un climat d’intimidation des opposants au boycottage, une minorité des étudiants d’une institution s’autorise sans scrupule à bloquer l’accès aux immeubles et aux salles de cours à l’ensemble des étudiants. On sert alors l’argument que l’assemblée générale est souveraine.
À Garneau, par contre, après que les deux tiers des électeurs se furent opposés au boycottage des cours, la direction de l’association des étudiants, affiliée à l’ASSÉ, a maintenu le nolisement d’autobus, à même l’argent provenant des cotisations des deux tiers des membres opposés à une participation à la manifestation d’hier, pour permettre à ceux qui étaient favorables de donner suite à la volonté de leur minorité. Il s’agit d’une application boiteuse et à deux vitesses d’une décision prise démocratiquement par une large majorité.
rECONNAÎtrE uN DrOIt
Le ministre François Blais a refusé de s’engager dans la voie d’une loi qui reconnaîtrait de facto un droit de grève aux étudiants qu’ils ne possèdent pas actuellement.
Il a raison que ce droit reconnu aux travailleurs syndiqués dans le Code du travail n’existe pas pour les associations étudiantes qui ne sont pas des syndicats.
Même s’il n’existe pas dans une loi, celles-ci se le sont approprié. Il est plus que temps d’en encadrer l’exercice.
Le très respecté juriste Pierre Trudel s’est déjà prononcé dans son blogue au Journal en faveur d’un vote secret obligatoire pour déclencher un arrêt des cours, pris dans des conditions optimales.
La légitimité des décisions des associations étudiantes serait ainsi renforcée. Ces décisions lieraient tous les membres. Une telle mesure législative aurait pour effet d’enrayer la judiciarisation de plus en plus répandue des interruptions de cours.
Les résultats des votes électroniques pris dans la région de Québec montrent que nous pouvons nous fier à la maturité d’une large majorité chez les étudiants dans leur prise de décision.
Même si le droit de grève n’existe pas dans une loi, il est plus que temps d’en encadrer l’exercice.