Groupes criminalisés
Le Journal a visité la raffinerie ultra secrète à la mine Canadian Malartic
MALARTIC | À la mine Canadian Malartic, chacun des lingots vaut 675 000 $. Cette richesse fait rêver les groupes criminels qui sont à l’affût de la moindre information sur les mesures de sécurité exceptionnelles utilisées par la mine.
Le Journal a eu le rare privilège de visiter la raffinerie de cette mine d’Abitibi et d’assister à une coulée de cinq lingots d’or et d’argent. Mais avant d’y entrer, il a fallu se soumettre à une enquête approfondie de quelques semaines.
La raffinerie, où 750 M$ en lingots sont produits par année, est une véritable forteresse. Il y a des caméras partout et son accès est contrôlé par de multiples niveaux de sécurité dont on ne peut pas révéler les secrets.
Seulement quelques-uns des 700 employés de la mine savent où elle est située dans l’usine. Encore moins y ont accès.
Les groupes criminels s’intéressent à cette richesse comme le prouve un important complot visant le vol de millions de dollars en lingots d’or qui a échoué à la dernière minute en 2010.
«On l’a vu avec Écrevisse et les évadés d’Orsainville. Le crime organisé est présent en Abitibi et on peut être une cible. Ça n’arrive pas qu’ailleurs. La particularité de l’or est qu’on peut transporter une valeur très grande dans une valise de voiture», soutient le directeur adjoint à la mine Canadian Malartic, Patrick Champagne.
ENQUÊTE
La minière a engagé un ex-policier de la GRC qui a la tâche de fouiller le passé des visiteurs et des employés.
Pour les travailleurs qui seront affectés à la raffinerie, une enquête sur l’entourage sera également effectuée. Le niveau d’endettement des employés est aussi validé.
Certains travailleurs qui oeuvrent dans les mines depuis 30 ans n’ont jamais mis les pieds dans une raffinerie et n’ont jamais vu de lingots. La règle d’or est d’en dire le moins possible afin d’éviter que des informations ne se rendent aux oreilles du crime organisé.
«On n’engagerait pas quelqu’un qui aurait été condamné pour vol ou recel. Tout ce qui pourrait avoir un lien avec le crime organisé, on ne le laissera pas passer», a mentionné M. Champagne.
PERSONNE NE SAIT TOUT
«La meilleure façon de protéger notre or et, encore plus important, d’éviter que nos employés soient à risque de se faire pointer une arme à feu sur la tempe, c’est d’en dire le moins possible et que le moins de gens possible soient informés», croit le surintendant production chez Canadian Malartic, Jean Châteauneuf.
Aucun employé ne connaît toutes les mesures de sécurité. La mine évite ainsi de mettre les employés et leur famille à risque.
Si les criminels veulent connaître l’ensemble du portrait, ils devront être de connivence avec plusieurs personnes, ce qui rend leur tâche beaucoup plus difficile.
VOÛTE
Même si la mine détient une voûte hyper sécurisée, elle ne s’en sert jamais. Il n’y a jamais d’or qui dort ici.
«Les lingots quittent le site pendant qu’ils sont encore chauds. Le meilleur moyen de ne pas se faire voler d’or, c’est de ne pas en avoir sur place», soutient M. Châteauneuf.