Son mari couché par terre « comme un chien » au CHSLD
Je veux que ça avance dans la dignité. Je veux qu’il reste au CHSLD et qu’il ait un service un pour un. Ils n’auront pas le choix de le donner à l’hôpital, pourquoi ne pas le donner dans un milieu de vie meilleur qu’à l’hôpital ? » – Colette Duguay Il apparaît que le niveau de présence et d’intervention demandé à la famille met en péril leur qualité de vie, leur propre santé psychologique et physique, de même que leur pérennité d’emploi. » – Rapport de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal
Un résident de CHSLD atteint de la maladie d’Alzheimer et aveugle, qui tombe fréquemment, passe des heures couché par terre dans sa chambre parce que les employés n’ont pas le temps de s’en occuper, déplore sa femme, qui paie 5000 $ en soins par mois.
«Il est couché par terre comme un chien. C’est inhumain, rage Colette Duguay. Laisseriez-vous un de vos proches comme ça?»
Voilà plus de 10 ans que cette dame prenait soin à domicile de son mari de 69 ans, Fernand Debien, atteint de la maladie d’Alzheimer. L’homme a reçu le terrible diagnostic à 58 ans et la maladie l’a rendu aveugle.
Parce qu’il devenait trop exigeant au quotidien, Mme Duguay s’est résolue à le placer au Centre d’hébergement des Moulins, à Terrebonne, en février dernier.
Si elle pensait avoir du répit, c’est tout le contraire qui se produit.
«On m’a appelée souvent pour que je vienne m’en occuper, parce qu’ils n’en pouvaient plus, souffle la dame, aidée par sa belle-fille. La nuit, j’arrivais en pyjama pour les aider. On n’a plus de vie. On ne survivra pas à tout ça.»
Inquiète, Mme Duguay a fait installer une caméra de surveillance dans la chambre. Dans la vidéo du 20 août dernier, que Le Journal a visionnée, M. Debien a passé plus de deux heures couché par terre. Il a même eu la tête coincée contre le climatiseur durant de longues minutes (voir photo).
PAS DE DIGNITÉ
La nuit, des employées viennent le voir de temps en temps, mais elles le laissent volontairement sur le tapis et lui donnent un oreiller pour qu’il dorme par terre.
«Je capote quand je le vois par terre. Un être humain mérite d’être traité dans la dignité», croit sa femme, qui rappelle que son mari paie 1811 $ de loyer par mois.
En plus, Mme Duguay paie au privé 60 heures d’aide par semaine (3200 $ par mois), pour un total de plus de 5000 $.
Et malgré tout, c’est insuffisant. Depuis 10 jours, M. Debien a fait 12 chutes, a calculé sa conjointe.
«Il tombe parce que personne n’est là pour s’en occuper!» dit-elle, ajoutant que son mari a des ecchymoses sur les bras et des douleurs au dos.
Selon une récente évaluation médicale de l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal, M.Debien a besoin d’une aide constante.
«Il apparaît cependant nécessaire qu’il puisse avoir un préposé 24 heures sur 24 afin de prévenir les risques d’escalade d’anxiété et d’agressivité, les risques de chute, tant que son comportement n’est pas contrôlé», lit-on dans le rapport.
D’ailleurs, l’homme était surveillé 24 h sur 24 durant son séjour à l’hôpital, en juillet dernier.
«On a l’argent pour s’en occuper à l’hôpital, mais pas au CHSLD? C’est un non-sens, dit Mme Duguay. Ça coûte beaucoup plus cher à l’hôpital!»
AIDE CETTE SEMAINE
Selon Mme Duguay, la direction du CHSLD lui a récemment dit ne plus être apte à s’occuper de M. Debien et envisagerait un transfert à l’hôpital (voir autre article).
«On est toujours sur le qui-vive, il a besoin de surveillance tout le temps! Je sais que les infirmières font ce qu’elles peuvent, mais ce n’est pas assez.»
Pour Mme Duguay, il est inconcevable que son mari n’ait pas droit aux soins pour assurer sa sécurité.
«Il n’y a rien qui bouge parce que ça coûte de l’argent. Mais on parle de dignité humaine. Il a besoin d’aide.»