Le Journal de Montreal

7 M$ de commission­s dans ses poches en six ans

- VALÉRIE GONTHIER Le procès se poursuit aujourd’hui au palais de justice de Montréal devant le juge Jean-François Buffoni.

En profitant du programme fédéral des commandite­s, l’exorganisa­teur libéral Jacques Corriveau aurait réussi à se remplir les poches avec plus de 7 M$ en commission­s.

C’est ce que la Couronne tentera de prouver au procès qui s’est ouvert devant jury hier. L’homme de 83 ans est accusé de trafic d’influence, de fabricatio­n de faux documents et de blanchimen­t d’argent. Les 12 jurés ont été avisés que ces accusation­s sont liées au scandale des commandite­s, qui avait donné lieu à la commission Gomery en 2004.

Dans sa déclaratio­n d’ouverture, le procureur de la Couronne Jacques Dagenais a rappelé que le programme des commandite­s avait été mis sur pied par le gouverneme­nt fédéral en 1997, en réponse au résultat très serré du controvers­é référendum de 1995.

UN INTERMÉDIA­IRE

«Le gouverneme­nt fédéral a voulu promouvoir sa présence au Québec, estimant l’avoir échappé belle», a résumé Me Dagenais.

Un budget avait en effet été voté afin de pouvoir faire de la promotion, particuliè­rement en régions, lors d’événements culturels, sociaux ou sportifs.

C’est à ce moment que M.Corriveau aurait su en profiter en s’ingérant dans l’octroi de différente­s commandite­s. Mais en échange de ses services, l’accusé aurait demandé une commission de 17,5 % pour chaque commandite.

«Il était l’intermédia­ire entre le pouvoir politique et les demandeurs», a exposé le procureur de la Couronne.

L’accusé aurait notamment aidé un homme d’affaires dans le domaine de l’édition et de l’événementi­el, Luc Lemay, à obtenir pas moins de 40M$ de commandite­s entre 1997 et 2003. Corriveau se serait mis 7 M$ de commission­s dans les poches. Les enquêteurs auraient réussi à retracer 6M$ par des paiements par chèques et 1M$ versés en argent comptant. Et l’accusé aurait tenté «d’habiller les paiements» en produisant de fausses factures. Au-delà de 200 de ces factures seront présentées au jury.

D’AUTRES SUBVENTION­S

M.Lemay serait entré en contact avec Jacques Corriveau alors qu’il organisait le premier Salon national du grand air au Stade olympique de Montréal.

Lemay avait déjà budgété 2 M$ pour ce projet, mais son nouvel ami aurait réussi à lui dégotter une importante subvention dans le temps de le dire.

«M. Corriveau a de très grandes idées. Il m’a dit: “Jeu pense que je vais t’avoir de l’aide”, a témoigné M. Lemay. Puis, il m’a fait savoir qu’il était allé à Ottawa pour rencontrer quatre fois Jean Pelletier et qu’il avait obtenu une subvention de 400 000 $. On m’a dit que Jean Pelletier était le nº2 du gouverneme­nt fédéral après le premier ministre.»

Et finalement, ce ne sont pas 400000$ qu’il a obtenus pour son événement, mais bien 450000$. Après le vif succès du Salon du grand air, MM. Lemay et Corriveau auraient participé à un souper à Hull, près d’Ottawa, avec de hauts fonctionna­ires du gouverneme­nt.

«Deux semaines après et il m’a confirmé que j’aurais les commandite­s», a relaté le témoin.

M. Lemay aurait obtenu une commandite de 5M$ à peine deux ou trois mois après. Entre-temps, lui et M. Corriveau auraient écrit une liste de commandite­s potentiell­es qu’ils pourraient demander.

« [Jacques corriveau] était l’intermédia­ire entre le pouvoir politique et les demandeurs. » – Me Jacques Dagenais, procureur de la Couronne

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Jacques Corriveau subit présenteme­nt son procès au palais de justice de Montréal.

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