LA BUREAUCRATIE AURA EU LEUR PEAU
Une PME subventionnée et récompensée par Québec
Photographiés aux côtés des élus tout souriants qui leur dépliaient les millions de dollars des contribuables en 2013, les dirigeants d’une startup québécois n’ont plus le coeur à la fête: ils ont fermé, dénoncent un «acharnement» du ministère de l’Environnement, et les vérifications faites par notre Bureau d’enquête leur donnent raison sur plusieurs points.
La PME en question s’appelle Oriens Technologies. L’usine est basée à Bécancour, au Centre-du-Québec.
L’entreprise avait pourtant le vent dans les voiles avec le développement d’une technologie pour recycler des résidus polluants des alumineries.
«L’industrie mondiale de l’aluminium a un fléau qui s’appelle les brasques. C’est une matière résiduelle dangereuse et l’industrie cherche une solution pour éviter de les enfouir. Nous, on l’a, et c’est une percée technologique de classe mondiale […] C’est une revalorisation complète. On ne génère aucun déchet», explique le vice-président d’Oriens, Gilbert Guérette. Et il n’est pas le seul à y croire: √ La technologie a obtenu, du ministère de l’Environnement, un prestigieux prix Phénix, secteur innovation.
√ D’importantes alumineries du Québec ont manifesté leur intérêt, dont une qui avait une entente commerciale
√ Investissement Québec a consenti un prêt sans intérêt de 1,4 M$ et le gouvernement fédéral a prêté 875000$. Au total, 12M$ ont été investis, en incluant les fonds privés.
BUREAUCRATIE EN FOLIE
L’usine a donc commencé ses activités en avril 2015.
Mais en décembre de la même année, «à la grande surprise» d’Oriens, des fonctionnaires du ministère de l’Environnement, au Centredu-Québec, ont «requis» au gouvernement de cesser de verser les aides financières promises à l’entreprise, allègue Oriens.
Le ministère leur a transmis une série d’avis de non-conformité, notamment quant à un entreposage déficient, des constructions et des équipements inadéquats.
Oriens suggère que les conditions exigées ne sont pas celles qui doivent s’appliquer pour leur technologie. Elle tente néanmoins de se conformer par une demande de modification et de renouvellement du permis pour ses activités auprès du ministère, en février.
Le ministère de l’Environnement a alors eu besoin de près de 250 jours pour prendre une position officielle sur la poursuite des activités de l’entreprise.
Le ministère devait pourtant s’engager à délivrer une réponse «dans les 75 jours». Entre-temps, Oriens a dû mettre à pied ses 27 employés et a cessé ses opérations.
Avis juridique et technique en main, Oriens «a démontré que la grande majorité des non-conformités soulevées sont non fondées […] et outrepassent sévèrement les normes en vigueur», mais le ministère «n’a jamais donné suite», soutient l’entreprise, soulignant qu’à au mois cinq reprises, le ministère n’a pas répondu à leurs communications.
C’est trois jours avant l’échéance de son permis, en juillet, qu’Oriens a appris que sa demande ne pouvait pas être traitée dans les délais et que ses activités devaient être suspendues. Et ce n’est que ce mois-ci que l’entreprise a reçu une réponse finale pour refuser l’octroi d’un nouveau permis.
L’entreprise soupçonne le ministère d’avoir répondu tardivement pour s’assurer qu’elle ne soit jamais en mesure d’obtenir son nouveau permis. La saga se poursuit. L’entreprise a décidé de contester devant le tribunal.