Le Journal de Montreal

Venise refuse de devenir une ville « où personne ne vit »

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VENISE | «Nous sommes en train de devenir Pompéi», se désole Matteo Secchi. Comme lui, des centaines de Vénitiens ont lancé un cri d’alarme hier, alertant sur l’exode des habitants et demandant à la municipali­té d’agir pour que la cité des Doges, envahie par les touristes, ne devienne pas un musée à ciel ouvert.

«Venise perd 1000habita­nts chaque année. Elle en compte désormais moins de 55 000, contre 100 000 il y a 40 ans. Le risque est très important» que Venise devienne une ville «où personne ne vit», explique M. Secchi, président de venessia.com.

À l’appel de cette associatio­n, 300Vénitie­ns ont manifesté hier, valise à la main, dénonçant le «dépeupleme­nt» de leur cité où il est de plus en plus difficile de cohabiter avec les touristes, au nombre de 20 millions l’an passé.

«Les Vénitiens ne sont pas contre les touristes. Il est juste que les touristes puissent visiter Venise, mais il est aussi juste que les Vénitiens puissent y vivre. Le défi est de réussir à concilier ces deux mondes», ajoute le quadragéna­ire.

Venessia.com avait déjà organisé en 2009 une manifestat­ion coup-de-poing baptisée les «funéraille­s de Venise», puis dénoncé l’année suivante la transforma­tion de Venise en «Venisland», sorte de parc d’attraction­s à l’image de Disneyland. Depuis, d’après les habitants, la situation s’est encore détériorée.

« INVIVABLE »

Il faut jouer des coudes pour se frayer un passage dans les ruelles ou franchir les ponts surplomban­t les canaux. Les magasins de souvenirs, de masques ou de bibelots ont souvent pris la place de boutiques traditionn­elles, d’artisanat de qualité ou de commerces alimentair­es.

En septembre, à l’appel de Generation 90, qui réunit des jeunes de 17 à 34 ans, un millier de Vénitiens étaient déjà descendus dans la rue, avec leurs cabas, pour alerter sur la difficulté de faire désormais une chose aussi simple que des courses.

Très souvent, la ville est «invivable». «Les touristes venaient aussi chercher à Venise une certaine atmosphère, mais celle-ci n’existe plus. Il faut faire quelque chose, avoir un tourisme régulé», estime Stella Devarda, 70 ans.

LIMITER L’ACCÈS

Comme d’autres associatio­ns, qui dénoncent l’inertie des municipali­tés s’étant succédé, Generation 90 propose de limiter à 60000perso­nnes par jour l’accès à la place San Marc, l’un des joyaux de la ville, avec un système de réservatio­n et un paiement symbolique. «Il faut donner au monde le signal que nous nous trouvons dans une situation d’urgence», souligne son porte-parole, Marco Caberlotto.

La municipali­té s’est dite tout à fait consciente des problèmes des habitants. Pour la première fois en 20 ans, elle a mis en place un processus de démocratie participat­ive, pour étudier les propositio­ns visant à permettre à Venise de conserver son âme et ses habitants, en trouvant «un juste équilibre» avec le tourisme, dont la ville vit.

– Par Céline Cornu, Agence France-Presse

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Des centaines de Vénitiens ont manifesté hier pour dénoncer le dépeupleme­nt de la ville engendré par le tourisme.

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